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HISTOIRE ET PATRIMOINE 

Sommaire

Le Domaine des Chabaudières

Le Domaine Des Chabaudières

LE DOMAINE DES CHABAUDIERES,
ANCIEN PAVILLON DE CHASSE DES BARONS DE CHAILLOUVRE.

 

Situé sur l’actuel chemin des Chabaudières dont l’ancienne dénomination était: chemin des Chabaudières au Château-Vieux, au lieu dit des Chabaudières rappelant un Chabaud ou Chabot, nom médiéval assez courant dont la variante Chabeu était le nom original des seigneurs de Saint Trivier, le domaine comprend la maison de maître dans un parc arborisé, un pigeonnier d’origine, une cour intérieure de service et une ferme adjacente mais indépendante, l’ancien mas des Chabaudières. De nombreuses terres y étaient rattachées, arables, pâtures, vignes, bois et réserves (terres en jachère ou en attente).
 

 A la fin du 17e siècle, la baronnie de Chaillouvre a pour base juridique et féodale, le château de Chaillouvre qui a gardé pour l’essentiel les caractères d’une petite place de guerre malgré le rattachement à la France des Pays de l’Ain, Bresse, Bugey, Pays de Gex et Valromey par le traité de Lyon de 1601. Seule la Principauté de  Dombes et donc Chaneins reste indépendante sous la direction des Prince et Princesses.


Henri de Bourbon-Montpensier, de sa fille Marie et de sa petite-fille, Anne-Marie-Louise d’Orléans la Grande Mademoiselle.

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Le château sera pratiquement inhabitable jusqu’en 1853 date à laquelle le nouveau propriétaire, Philippe Rousset l’aménagera en manoir confortable. Alors que vers 1680, le Baron de Chaillouvre réside habituellement à Bourg dont il est le Gouverneur pour le Roi, Bailli de Bresse puis Lieutenant du Roi. Il vient résider dans ses baronnies (car il est aussi Baron de Choin et de Langes) pendant les périodes de chasse mais c’est alors au château de  Barbarel sur la Paroisse de Saint Etienne de Chalaronne qu’il réside. A l’époque, la chasse est le grand sport de la noblesse et c’est sans doute pour cette raison qu’il lui faut un domaine spécialement dédié à cette activité. De plus il possède sur ses terres les ruines du Château-Vieux de Chaneins sur l’emplacement de la Poype de Chaneins. Sans doute abandonné par la famille de Chaneins partie s’installer dans le Lyonnais à Vourles au 15e siècle, on y trouve  une riche provision de matériaux pour le remploi, avec un cheminement aisé pour les convois par le chemin des Chabaudières.

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 Parlons un peu plus du personnage. Guillaume Claude de JOLY de CHOIN, né en 1621, Chevalier, Baron de CHOIN, de LANGES, de CHAILLOUVRE, Grand Bailli de Bresse, Gouverneur pour le Roi de Bourg en Bresse, a épousé en secondes noces, Anne Clémence Bonne DE GROLEE de MEPIEU de vielle souche  dauphinoise. Cela fait un couple très en vue dans toute la région avec une obligation de tenir la première place vis à vis d’une noblesse souvent plus ancienne et volontiers querelleuse.

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 A cela s’ajoute un fait familial particulier. Une des filles du couple, Marie-Thérèse Emilie DE JOLY de  CHOIN, née en 1670, va devenir très tôt Dame d’Honneur de la Princesse de CONTI (fille de Louis XIV et de Mademoiselle de la VALLIERE) et en 1685, après la mort de la Dauphine, sera remarquée par le Grand Dauphin Louis. Plus tard en 1695, Mademoiselle de CHOIN deviendra l’épouse morganatique du Grand Dauphin sans jamais porter le titre de Dauphine et résidera au Château Neuf de Meudon bâti à son intention . Après la mort du Dauphin en 1711, elle se retire discrètement à Paris ou elle meurt en 1732. Si sa venue dans la région n’est pas attestée, il ne peut y avoir de doute sur son aura et son influence indirecte sur le  destin de sa famille.

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 Il est vraisemblable que la construction du pavillon de chasse débute après 1680. Le grand escalier central à volées porte  la date de 1684. Son style moderne  en fait un indice de création de  novo et exclut un réemploi d’un élément du Château Vieux  alors que plusieurs blocs de murs de la cour intérieure sont visiblement rapportés. A noter que les extrémités du bâtiment central ne sont pas d’origine et datent de la moitié du milieu du 19ème siècle, sans doute construites à l’initiative du notaire Coste,  ce qui semble confirmé par l’estimation pour l’imposition sur les propriétés bâties au titre des portes et fenêtres. La construction a sans doute été terminée avant la mort de Guillaume Claude en 1691.

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On ne peut que constater la remarquable rationalisation des fonctions des pièces à vivre et des annexes domestiques. Le puits par exemple est intégré dans la construction avec une protection contre les eaux de ruissellement et la mise à l’abri contre les fortes chaleurs. L’orientation générale permet la protection contre le froid matinal et l’exposition des pièces à l’ouest un éclairage maximal de l’après-midi. Un couloir longitudinal  permettait l’accès à toutes les pièces. Des restes de décors des plafonds et sur certains murs  autorisent à penser que les pièces de réception et d’apparat étaient l’objet d’une attention particulière.

  

 Sans documentation spécifique sur les jardins, on peut cependant imaginer des parterres dans le cadre d’un jardin à la française qui sans doute pouvait s’étendre largement dans la zone actuellement arborisée. Le but était évidemment d’être vu   et une haie basse de buis et de  petits arbustes est envisageable. Quant au pigeonnier remarquablement conservé, c’est un modèle d’ingéniosité et de sens pratique.

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Propriété privée, il faut se limiter à cette présentation succincte mais on peut toutefois rappeler les propriétaires successifs de cette belle demeure.  Après Claude Guillaume son fils aîné, Melchior de Joly de Choin lui succède dans ses fonctions officielles et comme Baron de Chaillouvre mais meurt tôt en 1694 au château de Barbarel. A la génération suivante, c’est le troisième fils qui hérite de la baronnie et des Chabaudières : Joseph Marie Emile de Choin. Par mariage de sa fille  Marie Emilie de Joly de Choin  en 1744, le propriétaire et baron est Charles Pierre SAVALETTE DE MAGNANVILLE, financier et Intendant pour le Roi, et surtout Garde du Trésor Royal. Leur fils Charles Pierre Paul de Magnanville dit le Sphynx sera Aide de Camp de La Fayette. Mais c’est une de leurs filles qui par mariage apporte Chaillouvre et les Chabaudières aux LA TEYSSONNIERE. A son tour Marie Anne Constance de LA TEYSSONNIERE, en épousant François Catherin  MARRON de BELVEY, nous amène à la période révolutionnaire. C’est en 1802 que le dernier Baron de Chaillouvre reprend les Chabaudières jusqu’à sa mort en 1830. Dans sa succession, toujours par le mariage de Charlotte Sophie MARRON de BELVEY, Chaillouvre passe  à Etienne Henri ROYER DE LA BASTIE tandis que les Chabaudières sont aliénées par vente directe.

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En 1831, Madame Veuve Jean Marie PERREAUD de Montmerle est propriétaire de nombreux biens sur Chaneins dont les Chabaudières et La Fraise. C’est ensuite un important notaire de Lyon, Jean Louis COSTE qui restera propriétaire et va faire construire les deux ailes du pavillon central pour y loger sa famille à une date indéterminée après 1882. Sa fille Marguerite ayant épousé Louis Henri Albert VEYRE DE SORAS lui succédera en 1896 après l’ intermède de son frère Claude Marie Victor COSTE de 1894 à 1896. Les VEYRE DE SORAS vont faire la séparation du pavillon et on rencontre en 1913 Joseph et Marie GUILLERMET puis en 1914, Victor Alexandre LACOUR de Romans. En 1926, Jean Claude CHANONARD puis Germaine CHANONARD en 1930 sont présents, avec Jean CARTIER mécanicien à Lyon et son épouse née Claudine DEVILLARD suivis de Mr et Mme DUVAL de Montmerle en 1947 et enfin Mr et Mme Guy VALLOIS. Côté Nord les époux BLANC précèdent à partir de 1930 Mr et Mme Paul VACHERESSE présents depuis 1965.

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Le but essentiel était de faire le point des connaissances sur ce remarquable édifice quasi inconnu mais si riche d’histoire et d’humanité.

Paul HENRY

Les maires de Chaneins de 1790 à nos jours

Créé par un décret du 22 novembre 1951, l'insigne officiel des maires aux couleurs nationales est conforme au modèle ci-après :

 

« Sur un fond d'émail bleu, blanc et rouge portant « MAIRE » sur le blanc et « R.F. » sur le bleu ; entouré de deux rameaux de sinople, d'olivier à dextre et de chêne à senestre, le tout brochant sur un faisceau de licteur d'argent sommé d'une tête de coq d'or barbée et crêtée de gueules. »

 

Le port de l'insigne officiel des maires aux couleurs nationales, dont l'usage est facultatif, est réservé aux maires dans l'exercice de leurs fonctions et ne dispense pas du port de l'écharpe lorsque celui-ci est prescrit par les textes en vigueur.

 

Lors des cérémonies publiques, le maire et les adjoints doivent porter obligatoirement un costume officiel (ci-contre).

Dans la pratique, c'est l'écharpe tricolore, dont le port est prévu par l'article R. 122-2 du code des communes, qui constitue la marque distinctive des maires et adjoints.

 

Liste des maires de Chaneins :

CONSUL pour 1787 Claude ROUSSET

CONSUL pour 1788 Benoît MOREL

MAIRE 1790 Claude MOREL

MAIRE 1792 Jean CHAILLON

AGENT MUNICIPAL 1795 Benoît MOREL

AGENT MUNICIPAL 1796 Claude MOREL

ADJOINT MUNICIPAL 1796 Benjamin PUTOD

MAIRE 1798 Antoine GIROUD

MAIRE 1800 Pierre DUPOND

MAIRE 1808 Claude François CHARVERIAT

MAIRE 1815 Claude BERTHELON

MAIRE 1816 Benoît PUTOD

MAIRE 1821 Claude BERTHELON

MAIRE 1842 Pierre CHAILLON

MAIRE 1848 Jean BEROUD

MAIRE 1852 Antoine GOYARD

MAIRE 1868 Gaspard ODET

MAIRE 1870 Pierre BERTHELON

MAIRE 1888 Claude GOIFFON

MAIRE 1893 Pierre BERTHELON

MAIRE 1896 Jean GOYARD

MAIRE 1900 Jean Claude NAIRON

MAIRE 1920 Paul BERTHELON

MAIRE 1933 Pierre CHARVERIAT

MAIRE 1950 Claude CHARLET

MAIRE 1959 Joseph DURAND

MAIRE 1983 Louis CHARLET

MAIRE 1989 Bernard GIL

MAIRE 2014 Patrice FLAMAND

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Les curés de Chaneins

Antoine MOIROUD 1388

André DECERTIIS 1410

Antoine CHABOT 1413

Jean PICHOD 1452

Guillaune BERTHELON 1478-1485

Jean CHABOT 1504 auteur du document gothique

Claude BERTHELON 1508-1533

Pierre BERTHELON 1533

Michel POLIGNIER 1561

Blaise DE BEAUVOYER 1567-1573

Pierre MAILLARD 1573-1575

Jérôme CHOLIER 1614-1622 curé lors de la visite de Mgr de Marquemont, archevêque de Lyon. Contemporain de Vincent de Paul.

Pierre de MOLIN 1622-1657 curé lors de la visite de Mgr Camille de Neuville.

Jacques DESHOLMES 1657-1664

Jean MILLIET 1664-1690

Claude Philibert BOUCHARD 1690-1707

GIMET 1707

Joseph BLANC 1708-1714

DEVAUX 1714-1715

Gaspard DEBOMBOURG 1715

Antoine SIMON 1715-1734

Les AUGUSTINS DECHAUSSES de la Croix Rousse à BEYBLEU 1725-1792 suppléent les curés malades ou absents.

François BOCHARD 1734-1754 meurt curé de Chaneins et est enterré dans l'église devant le choeur.

Jean CLAVIERE 1754-1775

Claude FAURE 1775-1792 contemporain des frères

Bonjour de Fareins devient officier de l’État Civil en 1793 puis instituteur à Chaneins

Culte caché 1793-1802 François Balthazar UCHARD

Benoît BOUTIN 1800 curé constitutionnel

Etienne CRETIN 1803-1810 1er curé concordataire 

Jean Baptiste FEUGET 1810 meurt à la cure

Pierre CHAPON 1810-1837

Jean Marie PUVILLAND 1837-1886

Pierre François BARET 1887- 1913

LAPIERRE 1913-1930

MAGNON 1930 -1935

PACHOT 1935-1965

La paroisse de Notre Dame de Chaneins est rattachée à Montmerle en 1965.

On a retrouvé le vieux bourg

C’était une tradition orale qui disait qu’un vieux bourg avait précédé le bourg actuel avec sa Grand’Rue et ses maisons bien alignées. Un document écrit par un curé de la paroisse, l’abbé Pierre François Baret (1887-1913) lors de la Séparation des Églises et de l’État en 1906, fait allusion aux vestiges d’un bourg primitif et d’une première église paroissiale mais sans les situer.

  C’est cette localisation manquante qui a conduit la recherche : les 7 planches du Cadastre dit napoléonien publié en 1831 et les 5 registres-matrices des Propriétés Bâties et non Bâties depuis 1831, ont été croisés page par page jusqu’à la découverte d’une terre appelée « Vieux Bourg » une première fois, puis une seconde fois « Petit Vieux Bourg ». Dans les deux occurrences, il s’agit de la même parcelle : A 145 du Cadastre de 1831.

 Le document extrait du Cadastre napoléonien indique que le dit Vieux Bourg se trouvait allongé du nord au sud entre la maison du Bois d’Y et Bellevue et les Sablaudes qui sont les bornes-témoins du Vieux Bourg. Une voie est-ouest toujours visible, le chemin des Dames est bien reconnaissable. C’est l’actuel chemin des Manettes. A  l’ouest, il conduisait aux Grandes Vignes et au chemin  menant du Bois d’Y au Rocher et à l’est au Montessuy et aux Chabaudières. Planté sur le tard d’érables champêtres dont certains plus que bicentenaires  existent encore, ce chemin des Dames est le souvenir des Chanoinesses de Neuville qui étaient co-seigneurs de Chaneins avec le Comte de la Bâtie et le Baron de Chaillouvres. La parcelle sur laquelle va être construite la Salle des Sports s’appelait le Pré des Dames.

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Les circonstances du transfert du bourg semblent liées à la réalisation de la Route Royale après le rattachement de la Principauté de Dombes au Royaume de France en 1763. En effet, avant cette date, le réseau routier local est très médiocre et constitué de chemins creux, mal empierrés, irrégulièrement remis en état par des corvées villageoises impopulaires. Les Ingénieurs des Ponts et Chaussées de Louis XV vont doter la région d’un réseau de voies principales de qualité, favorables aux transports et au commerce. La Route Royale de Bourg à Belleville est une de ces voies. C’ est notre D 17 actuelle. La nouvelle route tracée de novo en dehors du réseau traditionnel antérieur, à travers champs, vignes, prés et bois, transforme le paysage rural, favorisant les communications et les échanges. Les terrains disponibles autour du hameau de l’église vont permettre tout naturellement l’installation d’une auberge de voyageurs avec relais pour les chevaux, d’un atelier de charron, d’un carrossier et d’un maréchal ferrant. On trouve aussi un marchand d’épicerie au détail puis un cordonnier-cabaretier. L’extension du bourg de l’église et le rôle social et économique de carrefour avec la création des chemins carrossables de Peyzieux et de Cesseins feront rapidement perdre sa vitalité au vieux Bourg dont la population va vieillir, s’appauvrir et disparaître d’autant que la principale activité, la viticulture sur les Grandes Vignes, le Rocher et les vignes Mouloux de Montessuy tend vers le déclin. Le Cadastre de 1831 ne porte plus trace de maison à l’exception de la maison du Bois d’Y au nord, de Bellevue et des Sablaudes au sud qui peuvent donner une idée de l’architecture des maisons du Vieux Bourg.

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Les seigneurs et propriétaires

  Si vous désirez vous faire une idée de cette partie disparue de Chaneins, voici un itinéraire simple. Vous entrez dans ACTIPARC. Sur votre droite quatre arbres au moins bicentenaires dont 3 érables champêtres qui ont voisiné avec le Vieux Bourg. En tournant à gauche, vous êtes sur l’ancien chemin des Dames et au lieu de tourner à droite, vous prenez le large chemin de terre et là vous imaginez des maisons dombistes de part et d’autre avec quelques anciens chaninois, un peu vignerons, un peu paysans qui vaquent à leurs occupations de siècles en siècles.

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D’abord dès l’époque gallo-romaine et avant le 6ème siècle, une villa rurale importante a occupé les lieux. Un texte de 968-971 parle effectivement d’une « villa chalobra ». le nom existe dans la grande région dite franco-provençale, Forez, Dombes, Bresse, Bugey, Valais et Savoie, avec  plusieurs toponymes identiques issus de la langue commune, l’arpitan.
 

Sans doute fortifié  dès le 11ème siècle, le site de Chaillouvres est  investi par le Sire de Villars dès le 12ème siècle. Il joue  déjà un rôle essentiel comme vigie et comme point de contrôle de la route, sans doute ancienne voie romaine secondaire, qui passe à son pied, allant de  Châtillon  à Montmerle. C’est alors une tour-donjon à structure mixte, pierre et carrons, épaisse et capable de résister à l’incendie. Elle  augmentera la capacité de défense de la poype fortifiée de Chaneins qui est déjà en fonction lors de la construction du château, conçue essentiellement comme fortification. sans avoir immédiatement de rôle sur le plan féodal. On peut émettre l’hypothèse de la présence d’une garnison permanente de vingt à trente hommes sous les ordres d’un capitaine-châtelain.  L’organisation de la seigneurie est postérieure à la fortification. L’enceinte est déjà protégée par des douves.

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Il est logique de penser que la garnison est permanente. Le logement de la troupe se fait dans la plus grande salle. Il n’y a pas alors de manoir, c’est-à dire de résidence noble et  les exigences du service des armes  obligent à un aménagement fruste sans confort. L’ensemble doit être capable de  voir et de se défendre à 360 degrés, mais surtout à l’Ouest, danger principal et l’enceinte doit permettre d’accueillir la population  environnante en cas de conflit.
 

  La construction en carrons savoyards  sous-entend la présence d’une importante réserve de bois de chauffe  pour le fonctionnement de la carronnière. La zone périphérique forestière a pu servir à la fabrication des matériaux amenant rapidement la déforestation et ultérieurement la création d’un, puis des deux étangs sous-jacents en plaine tandis que les zones montueuses deviendront des vignobles ou des prés.

  

  La pierre ne peut venir que des carrières du Beaujolais ou du Revermont. C’est un ensemble soigné et efficace. Après la prise de possession de Chaneins par le Sire de Beaujeu vers 1325  et la fixation de la frontière du « Beaujolais à la part de l’Empire » sur la rive gauche du Moignans, Chaillouvres devient un poste de garde et de douane dont le rôle est orienté vers les terres du Comte de Savoie qui commencent à Baneins qui s’appelle alors Anthaneins. Le plateau en pente douce vers le Moignans permet une excellente visibilité du haut du donjon octogonal. La route qui serpente est donc facile à contrôler d’autant que  son assise glaiseuse limite fortement la rapidité des déplacements. En tout cas les Sires de Thoire-Villars ne sont plus les maîtres de Chaillouvres qui relève directement des Sires de Beaujeu.

 

  La fonction de siège de seigneurie féodale est plus tardivement avérée, même si l’on  connaît des personnages de rang chevaleresque portant  le nom de Chaillouvres tel Guy de Chaillouvres. Mais ils sont aussi seigneurs d’autres  seigneuries  plus importantes. Sans doute ne résident-ils pas sur place. Par exemple, Étienne Guyot, damoiseau, c’est  à- dire jeune noble sans domaine personnel a un fils Guyot , Seigneur de la Garde de Luisandres, de la Franchise (un fief de Dompierre sur Chalaronne) et de Chaillouvres. Son fils Geoffroy Guyot, également seigneur de la Garde fait hommage de ses terres au Comte de Savoie en 1323. On ne sait pas si l’hommage inclut Chaillouvres mais c’est possible. Le rôle militaire territorial  s’éclipse au profit de siège de seigneurie . Celle-ci est une seigneurie aux trois justices, haute, moyenne et basse et relève alors directement du Sire de Beaujeu puis de ses successeurs, les ducs de Bourbon, souverains de Dombes. Chaillouvres et Chaneins deviennent ainsi ce qu’on appelle souvent la « Porte de la Dombes orientale ». En l’absence du seigneur, un juge -châtelain, gradué en droit civil, exerce la justice et l’administration. Il deviendra permanent, que le seigneur réside ou pas. En 1373, un administrateur temporaire de Chaillouvres, Humbert du Saix obtient réparation  du seigneur Hugues de Saint-Trivier pour des exactions de ses hommes d’armes, sous la forme d’un de ses hommes qui est donné à Chaillouvres, représentant la somme de 70 francs-or.

 

  Il est impossible de connaître la disposition et la nature de la construction qu’on peut appeler manoir compte tenu des remaniements de 1853 qui donnent l’état actuel. On peut  toutefois savoir l’importance des biens de la  seigneurie grâce au document de 1389 qui détaille le partage de Chaillouvres entre les deux filles de Guichard de Chaillouvres, le dernier seigneur de ce nom et de Catherine de la Gelière son épouse, sans descendant mâle. A l’aînée, Anne, 5 hommes avec leurs redevances en produits et en deniers, ce sont des individus liés au domaine avec leur famille à perpétuité, d’une part et d’autre part 14 tenanciers, nous dirions métayers qui exploitent les fermes ou « mas »appartenant au seigneur sur contrat de plusieurs années. A ceux-ci s’ajoutent, des prés, des terres, des verchères, des étangs, des vignes, des curtils ou jardins.  La cadette, Hélia eut cinq hommes avec leur redevance en produits et en deniers, dix-huit tenanciers, plus des prés, des terres, le château avec ses granges, les fossés, les écuries, le pourpris, (l’enceinte), la carronnière, des vignes, des curtils et une forêt. On a ainsi une bonne idée de l’importance de la seigneurie, de sa population et de ses ressources. Ajoutons qu’à cette époque, Valeins n’est pas encore dans les mains de Chaillouvres.

 

  Par son mariage avec Perceval Le Merle, seigneur de la Franchise, petit fief de Dompierre sur Chalaronne, Anne ou Agnès  de Chaillouvres ne transmet pas dans un premier temps la Seigneurie à son époux tandis que le château comme on l’a dit, revient à Hélia épouse d’Aymonet de la Garde de ce fait successeur du seigneur. Mais un document de 1412 provenant de la duchesse douairière de Bourbon, effectue une reprise de fief pour Chaillouvres et attribue à Noble Homme Claude Poyal, damoiseau et à son épouse, Agnès de Chaillouvres, fille de Guichard de Chaillouvres,  le fief noble de Chaillouvres. On sait que le premier époux d’Hélia,  Aymonet de la Garde décède en 1408 sans héritier. La seigneurie est alors reprise par le suzerain de Dombes et attribuée à la fille aînée  Anne ou Agnès elle-même veuve de Percival le Merle et remariée à Claude Poyat après 1409. Ce dernier devient seigneur en 1412.

 

   Pendant les guerres locales entre la Savoie et la Bourgogne, Chaillouvres comme Tavernost, Saint-Trivier et de nombreux châteaux sont pris et repris par les belligérants, l’église de Chaneins et son château sont brûlés ou endommagés spécialement en 1460. Seule la  Bâtie restera indemne tandis que la Tour de Vaux à Valeins sera détruite. L’ensemble castral qui nous intéresse est au 15ème siècle pratiquement identique à celui qu’on connaît mais les douves bien qu’inefficaces persistent à cette époque. L’ensemble du domaine s’étend principalement sur Chaneins Est, incluant les écarts des Vermillières ou Verminières, Bouillaque, La Potte, Le Larcher, La Fraise ou la Saulée, le village de Chaillouvres au pied du château,  le Normand ou le  Narmand et Chassignolan. Il jouxte les terres du seigneur de Saint-Trivier dont les hommes ont de fréquents conflits avec ceux de Chaillouvres. On voit ainsi que le domaine du seigneur de Chaneins proprement dit est alors réduit au Bourg, à Montessuy, aux Chabaudières, aux Manettes et ne va guère que  jusqu’à Chalabron à l’Ouest et à un hypothétique Bourg-Vieux disparu. La paroisse Notre Dame de Chaneins est alors la seule unité administrative qui reproduit l’étendue de l’actuelle commune.  Agnès de Chaillouvres décédée, Claude Poyat épouse  en 1428, en secondes noces, Marguerite de la Gelière. Un successeur, Philippe de la Garde vend Chaillouvres à Guillaume Fornier fils de Guillaume Fornier, seigneur de Montluel, en 1491. Son fils Pierre Fornier lui succède et fournit le dénombrement en 1531. Il vend Chaillouvres à Pelonne de Bonzin en mai 1551. Riche veuve de Jean Cléberg, grand marchand de Lyon et de Genève, ancien échevin et né à Nuremberg, les lyonnais lui ont donné le surnom de « Bon Allemand » et son épouse est connue sous celui de « Belle Allemande » bien que Flamande d’origine. Elle prendra le titre de Dame de Chaillouvres.

 

  Lui succédera, son fils Etienne de la Forge, seigneur d’Ars et de Châtillon entre 1555 et 1561 seulement. Il fournit le dénombrement de Chaillouvres en 1563 et meurt sans enfant. C’est sa sœur Mathurine de la Forge qui l’apporte en dot à son époux Claude Vincent dit  Du Gour qui prendra le nom de Du Gour de Chaillouvres. Leur fils Jean Du Gour lui succède en 1585. Seigneur de Chaillouvres et de la Brosse, il a épousé Madeleine Champier, fille de Claude Champier, seigneur de La Bâtie et de Madeleine du Peyrat issue d’une grande famille lyonnaise. Les deux familles, Du Gour et Champier à elles deux, tiennent alors plus des deux tiers de Chaneins en leur pouvoir. La fille de Jean, Jeanne Du Gour, héritière, épouse en  1606,  Claude François de Joly, seigneur de Choin et premier baron de Chaillouvres qui décède en 1640. La famille de Joly va rester en possession de Chaillouvres avec successivement, le fils, François Melchior de Joly de Choin, chevalier et baron de Chaillouvres et de Saint Romain,  Gouverneur de Bourg en Bresse, mort en 1722 puis Claude François de Joly de Choin, baron de Langes le petit-fils et Jean de Joly de Choin, baron de Langes, Chaillouvres et la Chassagne. Autour de 1700, Valeins est acheté par le baron de Chaillouvres qui double de ce fait ses propriétés.

 

 Une information incidente, François Melchior signalé ci-dessus eut une fille célèbre : Marie Emilie Thérèse de Joly de Choin qui vivant à Versailles épousa en 1695 le Grand Dauphin, fils de Louis XIV, veuf, et se retira à Paris en 1711 à la mort de celui-ci. Le mariage étant morganatique, elle ne porta jamais le titre de Dauphine.

 

  C’est son arrière petite nièce, appelée aussi Marie Emilie de Joly de Choin qui épouse Pierre Savalette de Magnanville en 1744 et apporte Chaillouvres à ce fils de Fermier Général, lui-même Garde du Trésor Royal. Sans héritier direct, par succession intrafamiliale,  le domaine  passe au Comte de la Teyssonnière dont la fille Marie Aimée Constance de la Teyssonnière épouse en 1757, François Catherin de Marron de Belvey, officier de  dragons. Pendant cette période du 18ème siècle, ni les seigneurs ni leur famille ne résident  sur place. Seul un juge-châtelain salarié par le seigneur réside au château et dirige le personnel  et les métayers. Jacques George sera le dernier et officialisera le Cahier de Doléances de Chaneins après avoir participé activement à leur rédaction.

 

   Chaillouvres est au 18ème siècle une grosse entreprise viticole dont le personnel spécialisé change  souvent et dont la  durée de vie est sensiblement plus courte que les autres habitants de Chaneins. Le vignoble est dominant dans le paysage tandis que les deux étangs sont riches en poisson. Certains métayers obtiennent le droit de pigeonnier qui, en Dombes n’a jamais été limité à la noblesse.  L’agriculture traditionnelle est moins pratiquée que de nos jours tandis que le chanvre est cultivé, traité et préparé pour le tissage de toiles et de cordages. Le baron semble avoir acquis le domaine des Chabaudières en sus de ses terres d’origine. De ce fait , il est propriétaire d’une partie importante  du territoire du Bourg. La création de la route royale rectiligne, notre départementale actuelle, qui le traverse semble avoir amené un remembrement important dont le cadastre de 1830 porte les traces.

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L’ancienne route devient un chemin quasi vicinal tandis que le village de Chaillouvres n’est plus qu’un écart de Chaneins. Une partie du domaine au Nord, est amputée par l’assiette de la nouvelle route qui est plantée d’arbres de type platanes ou peupliers d’Italie pour les zones les plus humides après 1762. De nouvelles maisons sont alors construites à l’alignement de la Grand’Rue que nous connaissons aujourd’hui.

 

  La Révolution de 1789 fait disparaître l’organisation féodale mais la propriété  foncière reste en pratique identique. Le château non habité par le Baron de Marron de Belvey ne subira que peu de dégradation si ce n’est celle du temps. Les vignerons tenteront bien de s’approprier les vignobles mais sans grand succès ne pouvant s’équiper de matériel indispensable. Les métayers sont dans la même situation. Seule la décision d’Albitte , Représentant en Mission de la  Convention, d’assécher les étangs fera disparaître un des deux étangs qui d’ailleurs restera à l’état de marécage  pendant des décennies.  Vers 1800, Marron vient remettre en état son domaine et déclarer au Cadastre  nouvellement créé à partir de 1802-1807, l’étendue de ses biens, y compris la maison des Chabaudières. Il sera propriétaire jusqu’à sa mort en 1830, résidant à Bourg ou au château de Belvey à Dompierre sur Veyle.

 

  Une de ses quatre filles, Charlotte Sophie de Marron de Belvey née  en 1806, épouse en 1826, Etienne Henry Royer de la Bastie (1799- 1863) qui reçoit en dot le domaine de Chaillouvres tout en résidant à Belvey. Etienne Henry Royer de la Bastie  cède Chaillouvres au début des années 1831 à Philippe Rousset, avoué à Trévoux puis à Lyon qui à partir de 1853, entreprend une importante restauration-reconstruction du manoir, ce avec un résultat de haute qualité tel qu’on peut le voir de nos jours. Il a pour successeur François Gabrielle Noémie Rousset résidant à Lyon puis à Chaillouvres en 1882. C'est ensuite en 1888, Gabriel Rousset, non résident suivi en 1906 de Mme Siméon Moranges née Bazzoni non résidente.
 

  Après 1914, Madame  Catherine Charveriat achète Chaillouvres au nom de son fils puis en 1923 celui-ci, Emile Charveriat,  haut fonctionnaire aux Affaires Étrangères et Ambassadeur de France et son petit fils François Charveriat sont successivement propriétaires avant Bernard Gil, maire de Chaneins pendant de nombreux mandats jusqu’en 2014. Ce dernier vend Chaillouvres aux époux Brians qui y résident à ce jour.

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Les seigneurs de la bâtie
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Château situé sur la commune limitrophe de MONTCEAUX.

 

La Bâtie est d’abord une forteresse militaire construite au 13ème siècle par les Sires de Beaujeu pour assurer le contrôle de leur possession du « Beaujolais à la part de l’Empire » dit encore « d’Outre-Saône ». Doté de 19 tours avec 3 enceintes, donc beaucoup plus vaste que l’emprise actuelle, elle est tenue par une garnison d’une soixantaine d’hommes d’armes résidant en permanence et commandée par un capitaine-châtelain nommé par le Sire de Beaujeu. Il n’existe par alors de manoir et le logement de la troupe se trouve dans les tours. Une chapelle sous le patronage de Saint Maurice se trouve en dehors de l’enceinte extérieure. Le hameau de Saint Maurice sur Montceaux en est sans doute un témoignage.

La première fonction de la forteresse est de faire front aux trois forteresses dépendant du Sire de Villars, à savoir la poype fortifiée de Chaneins, Chaillouvres et Tavernost. Au 14ème siècle, le Sire de Beaujeu dans ses conflits armés obtient du Sire de Thoire-Villars la suzeraineté sur Chaneins, après la Bataille de Chaneins de 1325 qui fixe la limite territoriale des possessions de Beaujeu à la rive gauche de la rivière Moignans. De ce fait, la Bâtie va devoir assurer la protection de la population qui, en cas de conflit sera accueillie avec les hardes et le bétail dans l’enceinte fortifiée de la première cour dite aussi Basse-Cour. Les gens concernés spécialement sont ceux de Beybleu, Bassereins, du Merle et de Saint Maurice .

Au 15ème siècle, les luttes incessantes entre le Duché de Savoie, qui désire impérativement revenir à la Saône et au Rhône, et le puissant Duché de Bourgogne, « le Grand Duché d’Occident » font de la région un puissant enjeu militaire. Les multiples forteresses de carrons sont prises et reprises par Savoie et Bourgogne. Seule la Bâtie reste imprenable et son suzerain le Duc de Bourbon, successeur par héritage des Sires de Beaujeu, maintient vaille que vaille une paix armée s’appuyant sur la Bâtie, le château de Montmerle et celui de Trévoux.

Avec l’essor de l’artillerie de campagne, mobile et plus résistante, les anciennes fortifications militaires en carrons savoyards ne peuvent plus jouer leur rôle de défense et d’abri, d’autant qu’apparaissent les armées régulières permanentes qui prennent la place de l’armée féodale, l’ost, dont le temps de campagne annuel était limité à quarante jours par an. Cependant pendant les Guerres Civiles, dites Guerres de Religion, la noblesse dombiste passée très majoritairement à la Réforme : Chaillouvres ou Tavernost particulièrement, s’efforcera de mettre la main sur la Bâtie qui, en dépit de ses efforts restera un bastion catholique. En 1595, les troupes royales de Henri IV commandées par Biron et à majorité calviniste, finiront par démanteler l’appareil défensif de la citadelle.

La fonction militaire de la Bâtie qui se termine alors ne doit pas masquer son rôle tout aussi essentiel de seigneurie féodale dont l’importance ira croissante du 14 ème au 18ème siècle. D’abord, simple seigneurie mais dotée de la Haute, Moyenne et Basse Justice, elle relevait directement des Sires de Beaujeu puis des Ducs de Bourbon, Prince de Dombes. Elle couvrait Montceaux, Mogneneins, la partie occidentale de Chaneins jusqu’au Rocher et des parties importantes de Guéreins et Genouilleux. Le premier Seigneur de la Bâtie connu est Guillaume de Francheleins en 1350. Après la famille de Francheleins se sont successivement les familles nobles de Juys, du Say puis Montaubert. Par mariage toujours, les Champier apparaissent en la personne de Claude Champier vers 1550. Il exerçait la fonction de Bailli de Dombes puis de Gouverneur de Dombes pendant la période du premier rattachement de la Dombes à la France de 1523 à 1560. C’est ce personnage qui fera obstacle aux seigneurs calvinistes qui voulaient créer en Dombes l’équivalent de Genève sur le plan religieux. A noter qu’à l’exception de ce dernier, les Seigneurs de la Bâtie ne résidaient pas sur place, le manoir n’existant pas encore. Ils résidaient dans d’autres résidences dont ils avaient déjà la seigneurie. Ils étaient représentés sur place par un juge-châtelain, gradué en droit civil et salarié par eux. On en a des traces dans les Archives de l’État Civil de Chaneins (Baptêmes, Mariages et Décès).

La Seigneurie de la Bâtie est érigée en Baronnie par le Prince Souverain de Dombes, Henri de Bourbon-Montpensier, à la fin du 16ème siècle en faveur de Jacques Champier qui est le premier Baron de la Bâtie. Ce sont les Champier qui ont vraisemblablement fait construire le premier manoir de résidence qui s’appuyait sur la muraille de la Haute-Cour en ouvrant celle-ci sur le versant occidental avec retour sur la muraille Nord et la tourelle -escalier d’observation surplombant l’ensemble. Curieusement dans la première moitié du 17ème siècle la Baronnie est inféodée, c’est-à dire attribuée à Noble Benoît Trelon avec le titre de Baron de Chaneins,Montceaux et Mogneneins. Ce Trelon fera aussi construire dans l’église paroissiale de Chaneins, une chapelle funéraire, ce qui sous-entend qu’à cette époque, il n’y a pas encore de chapelle castrale dans le château de la Bâtie.

La succession n’est pas claire puisqu’un autre Jacques Champier devient titulaire de la Baronnie. Il exerce les fonctions de Gouverneur de Dombes, en l’absence du Prince qui réside à Paris dans son Hôtel qui deviendra le Palais Bourbon. Ami et contemporain de la Marquise de Sévigné, il l’aurait reçu à la Bâtie mais on a une lettre de la Marquise qui dans un de ces voyages se casse le nez à la porte du château, en l’absence du maître des lieux, lors d’un de ses nombreux voyages entre Aix en Provence, Grignan, Bourbilly et Paris. C’est sans doute à cette période que la chapelle castrale Saint Maurice est aménagée dans le massif de la Poterne orientale du domaine. Avec certitude, on sait que l’Archevêque de Lyon, Camille de Neuville au cours de sa visite pastorale de 1655, y officie en insistant sur le fait que les gens du château doivent se rendre pour les offices à l’église de Chaneins dont dépend alors la Bâtie. En effet la limite de paroisse avec Montceaux passe par le milieu de la cour moyenne. Benoît Trelon élève à l’occasion une protestation sans résultat sur le fait qu il a été spolié de la chapelle de l’église Notre Dame de l’Assomption par Jacques Champier. On connaît à cette période un Pierre Cachet châtelain et lieutenant du Comte 1628-1693.

Au décès de Jacques Champier sans héritier, il semble que les Trelon retrouvent leurs droits et par le mariage de Marie-Anne de Trelon avec Clair Gilbert d’Ornaison, seigneur de Chamarande en Forez, celui-ci reçoit la Bâtie. Il fait partie de la célèbre et puissante famille des Talaru-Chalmazel et en son honneur, La Grande Mademoiselle souveraine de la Dombes élève la Baronnie en Comté en 1675. C’est donc le premier Comte de la Bâtie. Personnage important, Valet de Chambre de la Dauphine, puis du Roi Louis XIV et Conseiller d’État, il entreprend la transformation et l’embellissement du manoir en résidence classique avec ouvertures des fenêtres à la française, décors intérieurs baroques et lambris sculptés et peints, le tout sur une courte période de 1675 à 1684. Il fait redécorer la chapelle en style baroque simple et aménage les cours en jardin à la française.. A la demande du Roi Louis XIV, il vend en 1684 le Comté et achète la terre de Bonnes près d’Etampes et la fait transformer par le Roi en Comté de Chamarande.

Par achat à Chamarande, Jean Vidaud de la Tour devient Comte de la Bâtie en 1685.. Il est noble « de cloche » c’est à dire à la suite de l’exercice de la fonction d’échevin de Lyon et à condition de vivre « noblement : sans exercer de métier manuel ni de commerce de détail et sa fortune personnelle et familiale lui a permis d’acheter la Bâtie et de porter le titre de Comte. Il possède déjà le fief de la Tour à Saint Genis-Laval au sud de Lyon et par son mariage avec Gabrielle de Sève de Fléchères, il appartient à l’aristocratie financière régionale dont peut témoigner la château de Fléchères à Fareins construit par les aïeux de celle-ci au début du siècle. Il décède en 1703 et son fils aîné Pierre Vidaud de la Tour lui succède jusqu’en 1707 lorsqu’il décède à son tour.

Célibataire, la succession va à son cadet, Gaspard Vidaud de la Tour. Le nouveau Comte de la Bâtie épouse Catherine de Simiane branche de Montbives. Les Simiane sont une très noble et anciennement connue famille de Provence.. Leur fils né en 1706, Joseph Gabriel Vidaud de la Tour qui épouse Jeanne Gabrielle de Mondragon est Comte de la Bâtie jusqu’en 1749. Son épouse sera guillotinée en Avignon en 1794 à 88 ans.

 Pendant toute cette période qui est un peu l’âge d’or de la Bâtie le domaine direct est florissant et l’étude des Archives de l’État-Civil montre que de très nombreuses personnes habitent la Bâtie où les cours basse et moyenne sont aménagées et densément construites pour abriter les vignerons et les familles qui semblent venir le plus souvent du Beaujolais actuel et du Forez.. Sont aussi creusées dans les épaisses murailles des granges pour recevoir cuviers, tinels et outils agricoles. La Bâtie outre ses propriétaires et la famille élargie avec la domesticité normale devient alors du fait de cette nouvelle population un véritable hameau densément habité et bruissant d’activités viticoles et agricoles. La vigne et le vin très présents rappellent que nous sommes en plein « Beaujolais à la part de l’Empire ».

Les Comtes de la Bâtie résident assez peu au château qui a le plus souvent une domesticité réduite d’autant que Joseph Gabriel est un juriste qui vit plutôt dans ses appartements de Grenoble et ses terres du Dauphiné., situation encore plus marquée pour le dernier Comte de la Bâtie : Jean Jacques Vidaud de la Tour à partir de 1749. Le dernier Comte de la Bâtie sous l’Ancien Régime est comme son père un grand juriste et un magistrat réputé du Parlement du Dauphiné à Grenoble. Il épouse Marie Joséphine Louise Sophie de Cambis de Fargues, fille du Marquis de Velleron. Résidant le plus souvent à Grenoble ou en Dauphiné au château de Biviers, le couple est connu sous l’appellation de Comte et Comtesse de la BâtieBiviers. La comtesse décédera en 1776. Le Comte vivra avec sa mère la Comtesse douairière dite Madame de Mondragon. Devenu Procureur Général du Parlement de Grenoble, il est promu lors de la Réforme des Parlements par Maupéou, 1771 Premier Président du Parlement de Grenoble mais après l’abandon de celle-ci , il redevient Procureur Général et participe aux premiers soubresauts révolutionnaires de 1787 lors des événements de Vizille et de la Journée des Tuiles. Il cessera toute fonction officielle après la dissolution des Parlements en 1789. Malgré une vie discrète, il est mis en jugement avec sa mère sous la Grande Terreur de 1794 et condamné à mort avec sa mère de 88 ans sous l’accusation de contre-révolutionnaires. Le jour de son exécution en Avignon avec sa mère de 88 ans, il s’efforce de la ménager et celle-ci lui demandant où mangeront-ils ce soir , il il lui répond : avec les anges ma mère. Pour qu’elle ne soit pas bousculée par les aides du bourreau, il obtient qu’elle soit guillotinée la première après l’avoir luimême disposée sous le couperet et avant de la remplacer après l’exécution dans le sang maternel.

En 1789-1790, le château sera peu détérioré du fait qu’il est principalement occupé par une population viticole et agricole et que les documents féodaux ne sont pas à l’intérieur, faute de présence du Comte. La vie continue et les terres et vignobles sont progressivement considérés comme propriété des tenanciers . Il n’y aura pas de vente sous l’appellation de Bien national, le Comte n’ayant pas émigré. L’héritier, Aimé Gabriel Jean Jacques Vidaud de la Tour sous l’appellation de Vidaud ou Latour ou encore Vidaud-Latour se dissimule aux Armées dans des fonctions techniques avec la protection d’amis familiaux avant de revenir vers 1801 dans le cadre des lois du Consulat se faire reconnaître propriétaire de la Bâtie. Époux de Louise Marie Pianelli de la Valette, ils ont une fille née en 1799 , Gabrielle Lucrèce Zoé de Vidaud de la Tour qui épousera le Comte Eugène Henri François de Chabannes du Verger, origine des propriétaires de la Bâtie jusqu’en 1945.

A la mort d’Aimé Gabriel en 1834, les époux de Chabannes résideront principalement à Paris tout en assurant la gestion du domaine qui perdra une grande partie de ses vignobles avec le phylloxera mais apporteront beaucoup de soins à la création des écoles de Chaneins et de Montceaux ainsi qu’aux paroisses correspondantes sans oublier l’aménagement de nouveaux cimetières et équipements collectifs. On disait que la Comtesse Zoé connaissait personnellement tous les habitants de Chaneins , n’hésitant pas à intervenir lorsqu’elle le jugeait opportun, ce qui pouvait déplaire à certains. Elle décède en 1844 à la Bâtie tandis que son époux né en1791 meurt lui aussi à la Bâtie en 1877.

Leur fils aîné, Aimable, Marie, Laurent de Chabannes du Verger épouse en 1857 Marguerite Louis Anne de Bourbon Busset née en 1837. Tous deux poursuivent l’activité de leurs parents, gardant une grande influence sur toutes les activités sociales ou caritatives tant sur Montceaux que sur Chaneins et Marguerite de Chabannes après le décès de son époux et lors des épisodes dits de l’ Inventaires de 1906 et de la Séparation des Églises et de l’État, entamera une série de recours en contentieux pour vol et détournement de biens qui ne prendra fin qu’après 1940 par un compromis .et ce en partie à son avantage.

Pendant l’Occupation, la Bâtie fut un lieu de rencontres secrètes des responsables des réseaux de Résistance pour tenter l’unification des Mouvements. A ces réunions, Jean Moulin aurait participé. En 1945, la Bâtie devient propriété du COSOR, Comité des Œuvres Sociales de la Résistance qui en fait une maison d’accueil d’enfants et d’adolescents remaniant en dortoirs les salles les plus importantes et le bâtiment s’en ressentit terriblement jusqu’à ce que la famille de Chalon le rachète et entreprenne depuis la remise en état des lieux. Lors des Journées du Patrimoine, la Bâtie s’offre à la visite et celle-ci est fortement recommandée.

La Poype de Chaneins
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Connaissez vous la Poype de Chaneins ?

 

Dans la Proximité du Bourg, entre Larcher et la Croix Blanche, une petite élévation de terrain qu’un œil distrait peut prendre pour une simple butte naturelle est pourtant le témoin d’une fabrication faite à mains d’hommes et peut-être le plus ancien témoin archéologique de notre commune. Les photographies faites en août 2006 après les travaux agricoles et sous différents angles montrent bien un mamelon assez régulier entouré d’une large zone dénivelée mais différente du reste du terroir. Il s’agit en fait de la partie éboulée de la poype dont la hauteur pouvait être 3 à 4 fois supérieure à l’origine. Elle était entourée dans sa partie basse par un profond fossé en eau, sans doute délimité sur les deux versants par des pieux de 2 à 3 mètres. Ceux-ci étaient fichés profondément en terre sur plusieurs rangs et jointifs pour assurer une sécurité plus forte. Une seule porte en barbacane permettait l’accès au  dispositif. Il faut noter la proximité de la rivière, la Calonne  et imaginer un environnement de la forêt primitive, caractéristique principale de la fameuse « Forêt de Bresse » aujourd’hui réduite à quelques bois épars.

Mais de quand peut bien dater cette poype ? Des imaginations fertiles voulaient que les poypes soient des tombeaux préhistoriques ou encore des lieux du culte druidique. Il faut sans doute rapprocher l’origine au très haut Moyen Age, avant ou après l’époque burgonde d’autant que les autres poypes que nous connaissons se trouvent sur l’Ain, l’Isère, le Beaujolais et les confins de la Bourgogne. C'est approximativement l’espace occupé par les Burgondes, peuple germanique originaire de la Vallée de la Vistule qui a en plusieurs siècles émigré vers l’ouest. Il s’est installé à demeure en Burgondie, créant alors le Royaume Burgonde, pour être finalement soumis vers 540  par les Francs venus du Nord de la France.

Imaginons qu’une campagne d’exploration archéologique scientifiquement menée soit entreprise. Nul doute que nous pourrions en savoir plus sur ce témoin du passé de nos ancêtres chaninois et un peu de leur mode de vie. De nombreuses autres poypes sont à voir à proximité, à Villars les Dombes, à Saint André de Corcy, plus près de nous au Vieux Bourg de l’Abergement Clemenciat et il vous reste à en trouver d’autres en particulier là où se trouve encore un château de briques ou de « carrons savoyards » tout autour de nous.

 

Un chaninois curieux

Notice historique

La base juridique de l’existence des Sapeurs-Pompiers communaux est le décret présidentiel de Mac-Mahon du 29 12 1875 qui organise sur tout le territoire national, à l’échelon communal, les corps de sapeurs-pompiers.

En ce qui concerne Chaneins, en février 1884, le Maire Pierre Berthelon et le Conseil Municipal mettent en chantier la création d’une compagnie de Sapeurs-Pompiers en association avec la Municipalité de Valeins. La législation prévoit une organisation militaire sur le modèle d’une compagnie du Génie avec un capitaine, un lieutenant, un sous-lieutenant, plusieurs sous-officiers, plusieurs tambours et clairons et les hommes prennent l’appellation de sapeurs comme dans l’armée officielle, la sape étant un outil spécifique pour faire une tranchée. Le capitaine, chef de corps et les officiers subalternes sont nommés par décret présidentiel préparé par le ministre de l’Intérieur sur proposition du Maire, avec l’aval du Préfet de l’Ain. Le premier chef de corps est le capitaine Michel Charveriat, son adjoint est le lieutenant Claude Chambion et Henri Gudin est sous-lieutenant, décret du 20 mars 1884 signé Jules Grévy et Waldeck-Rousseau.  Officiellement à Chaneins-Valeins l’existence réelle est du 28 février 1884.

 

Les Sapeurs-Pompiers d’origine sont tous volontaires et engagés pour 5 ans, renouvelables. Ils doivent être dégagés de l’armée active et du fait de leur activité de sapeur-pompier sont dispensés de périodes de réserve. L’activité était bénévole et la commune devait acquérir le matériel de secours et payer les frais d’entretien et le renouvellement. L’effectif de la Compagnie est à l’origine de 54 dont 6 de Valeins et sera ramené à 41, le 27 août 1889 suite à la diminution des engagements dont plusieurs étaient conditionnels.

Les débuts de la compagnie se font sans difficultés majeures et le Conseil Municipal trouve un abri pour la pompe à proximité de la bascule. Cette pompe a besoin d’un véhicule de transport, un camion hippomobile fabriqué sur place par le charron carrossier. En septembre 1889, le chef de corps est Claude Chambion, lieutenant et son adjoint le sous-lieutenant Claude Martin. La Caisse de Secours Mutuel des Sapeurs-Pompiers de Chaneins-Valeins est instituée et considérée comme propriété communale en suivant les règles de comptabilité municipale. Le financement fait encore question et la commune attribue des crédits mais vers 1900 le Ministère de l’Intérieur donne une subvention annuelle modeste mais régulière pour secours aux sapeurs-pompiers si nécessaire et éventuellement pour achat de matériel. Le corps n’aura aucune autonomie financière.

Un autre sujet notable est l’idée de la militarisation du corps et de l’acquisition de fusils réformés par l’Armée. A cette époque, l’idée de la Revanche est dans les esprits et on reparle de la Garde Nationale qui a été dissoute en 1871 après la défaite de la Commune de Paris. Le député de la circonscription, Bérard, à la demande du Maire Nairon, sollicite le ministère de la Guerre en 1900 qui répond par une fin de non-recevoir en suggérant que la compagnie se transforme d’abord en société de tir. Des démarches du Chef de Corps et du Maire, sont alors tentées pour changer le statut juridique de la compagnie, sans résultat ni suite. On n’en parlera plus.

Le Décret du 10 11 1903 va porter Règlement d’Administration Publique sur l’organisation des Corps de Sapeurs-Pompiers, précisant spécialement les questions d’Honneurs et de Récompenses, dispensant officiellement les SP des périodes d’exercices de l’Armée Territoriale et interdisant aux différents Corps de participer ès-qualités aux services religieux en particulier lors des obsèques mais chaque membre pouvait y assister individuellement. On est en plein dans la période de Séparation de L’Eglise et de l’Etat. En 1903, le Chef de Corps est Claude Chambion lieutenant et son adjoint est Jean Meunier sous-lieutenant.

Concernant le matériel, début 1905, le charron-carrossier de Chaneins, Marion fournit un camion hippomobile pour le service de la pompe à incendie pour la somme de 100 francs or. Des Médailles d’Honneur sont attribuées par le Ministre de l’Intérieur sur demande du Maire et du Chef de Corps pour obtenir le renouvellement des engagements des anciens SP. En 1906, le Chef de Corps est Claude Martin, lieutenant et son adjoint Louis Odet sous-lieutenant par un décret signé Clémenceau. L’effectif est de 30 SP dont certains ont plus de cinquante ans. Il existe à l’évidence une usure des bonnes volontés et un vieillissement certain. Valeins fournit quatre SP.

Le Maire (1920-1932) Paul Berthelon indique le matériel de secours en usage : une voiture à deux roues accrochée derrière la pompe pour le transport du matériel, une pompe automobile sur quatre roues, manœuvre à bras, dix raccords à vis, cinq tuyaux d’un total de 60 m de diamètre 45 mm, cinq garnitures, neuf mètres de tuyaux caoutchouc, une lance de douze mm au jet, soixante-douze seaux en toile, quatre cordages, trente-sept ceintures de manœuvre et trente-trois képis.

Jean Gerbet sera Chef de Corps en 1932, comme lieutenant et son adjoint le sous-lieutenant Philibert Jacquet. Les archives sont presque muettes sur la période de la Première Guerre Mondiale et de l’immédiate après-guerre. Jean Gerbet est démissionnaire en 1941 et Philibert Martin est décédé. Jean Bulidon sollicité par le Maire Pierre Charveriat accepte à titre provisoire la fonction de Chef de Corps avec Jean Las pour adjoint. Cet adjoint est démis en fin 1945. Un important incendie chez Joseph Durand pour lequel le Centre de Secours de Chatillon est intervenu donne lieu au règlement des frais par la commune de Chaneins à celle de Chatillon et met en évidence la nécessité de la collaboration entre centres de secours et à la réglementation de cette collaboration. Finalement c’est le Service Départemental de Défense contre l’Incendie qui prend en charge les frais engagés. C’est le début de la départementalisation des Secours.

En 1967, le Maire Joseph Durand prend acte de la retraite de Jean Bulidon qui va être remplacé par André Hautin, sous-lieutenant. Le Conseil Municipal décide d’acheter 8 tenues de feu pour l’ensemble des SP de Chaneins. La commune achète en 1968 un fourgon automobile pour le Service de Lutte contre l’Incendie. C’est une estafette Renault vendue par le Service Intercommunal d’entretien des chemins de Chatillon. L’effectif est alors de onze pompiers. En 1978, l’ensemble du corps est équipé en tenues d’uniforme.

En 2014, le Maire Bernard Gil et le Conseil Municipal acquièrent pour le Centre de Secours, un camion-citerne que le nouveau conseil et le maire Patrice Flamand font abriter dans les nouveaux locaux inaugurés ce jour.

Histoire des conscrits

L'histoire commence à la fin du 18ème siècle lorsque le régime révolutionnaire connu sous le nom de Directoire établit la conscription pour le recrutement de ses armées par la loi dite Jourdan-Delbrel de 1798. Cette loi sera en fonction jusqu'en 1998. Le principe général de cette loi est d'inscrire sur une liste de « conscription » tous les hommes âgés de 20 ans d'où le nom de conscrits, qui remplissent ainsi leur « devoir civique », principe révolutionnaire qui au début s'exerçait de façon volontaire puis quasi obligatoire avec la levée en masse . En pratique la liste est tenue par les municipalités et publiée chaque année par les maires. Les hommes sélectionnés en fonction de leur taille de leur état physique et psychique sont incorporés dans les mois qui suivent dans un corps de troupe. Nombreux sont ceux qui ne rejoignent pas leur lieu d'incorporation : les insoumis de plus en plus nombreux dans les dernières années de l'Empire, spécialement dans la région lyonnaise et la Dombes. Le futur curé d'Ars, Jean Marie Vianney, fut un de ces insoumis en 1808.

 

La loi GOUVION SAINT CYR de 1818 établit le service militaire de 6 ans pour les conscrits qui ont tiré un mauvais numéro le jour de la conscription. Cette disposition légale s'accompagne de la possibilité du remplacement. C'est à dire qu'un conscrit malchanceux ayant tiré un « mauvais numéro » » peut moyennant finance obtenir d'un « bon numéro » de le remplacer à l'Armée. Le problème est d'arriver à convaincre un tel oiseau rare. C'est l'occasion de manoeuvres plus ou moins glorieuses de la part des familles qui utilisent promesses et menaces, intimidations et tentatives d'achat dans des réunions très arrosées jusqu'à l'obtention de l'accord plus ou moins conscient du futur remplaçant.Une part non négligeable des Fêtes de Conscrits prend son origine dans ces pratiques peu reluisantes qui vont se maintenir jusqu'en 1872, en laissant des traces dans les traditions familiales et les conflits locaux.

 

En 1872, après la défaite française dans la guerre avec la Prusse, le remplacement est supprimé et chaque contingent de conscrits est divisé en deux arbitrairement. La première moitié fait cinq ans de service, constituant un noyau d'armée quasi professionnelle et l'autre moitié fait seulement un an. Le recrutement se fait au chef lieu de canton, Saint Trivier sur Moignans pour Chaneins, et le Conseil de Révision se tient dans la plus grande salle de la Mairie où dans le plus simple appareil, chaque conscrit après passage à la toise qui élimine les garçons mesurant moins d'1m515, passe devant le jury (masculin) qui le déclare alors « bon pour le service » ou « réformé».

 

Après cet opération hautement civique et républicaine, les jeunes gens bons pour le service, en habit de fête (pantalon de fête en drap, chapeau à rubans et foulard, participent au « Charivari ». Des marchands ambulants vendent aux « classards », képis de fantaisie, trompettes, cocardes, insignes divers dont le célèbre ' « bon pour les filles » et brassards plus moins allusifs.Tous ces modestes brimborions resteront dans les maisons et constitueront le modeste trésor de ces futurs citoyens-soldats. Le Charivari constitue avec le Conseil de Révision un important rite de passage de l'enfance prolongée à l'âge adulte, avec force boissons alcoolisées, farces aux filles si possible de mauvais goût, chansons légères ou paillardes, ballades nocturnes aux flambeaux et sérénades burlesques au domicile des têtes de turc de la commune et bar ouvert le dimanche suivant. Les garçons refusés pour le service doivent quant à eux se faire discrets et éviter les quolibets et moqueries de leurs conscrits. Il se crée ainsi une solidarité virile indépendante du statut social et économique de leurs parents, au bénéfice de la classe d'âge susceptible de durer tout le reste de la vie, d'autant que l'incorporation se fera souvent dans les mêmes régiments de la région.

 

En pratique, dans les années normales, 35 pour cent des conscrits de la classe était appelé au service et la durée du service va être plusieurs fois modifiée, En 1889, la loi FRAYCINET ramène la durée légale du service de 5 à 3 ans. En 1905, la loi BERTEAUX supprime le tirage au sort et les diverses exemptions avec une durée unique de deux ans, introduisant la notion de sursis. En 1913, avec la montée des périls, la loi BARTHOU porte la durée légale à 3 ans avec appel à 19 ans, ce qui sera abaissé à 18 ans à la fin de la Grande Guerre. En 1923, c'est une durée de 18 mois , mais cette période légale sera l'objet de nombreuses exceptions avec le maintien sous les drapeaux hors durée légale à partir de 1935.

 

En 1970, le volontariat féminin est légalisé et progressivement les femmes accéderont à toutes les fonctions militaires dans les armes et les services. De ce fait , le petit monde des conscrits va devenir mixte d'autant que la mixité scolaire a montré la voie. Dans la région de la Vallée de la Saône, l'influence de la tradition de la Vague de Villefranche sur Saône a permis d'associer les décades précédentes aux conscrits de l'année modifiant profondément la signification originelle de la fête, soulignant la continuité des générations et la solidarité entre elles alors que le Service Militaire est officiellement supprimé en 2001.

Des origines à la Révolution

En bordure de la Côtière de Saône, la commune se trouve au cœur de l'ancienne Forêt primaire de la Dombes qui a progressivement disparu au cours du dernier millénaire laissant la place à des «essarts» propres à la culture classique des céréales, à des prés permettant l'élevage  et le «paissage» des animaux d'embouche, enfin la vigne et le chanvre à proximité des étangs. Le sol argilo-calcaire lié à son origine morainique, a en effet permis, au Moyen-Age la constitution de nombreux étangs artificiels dont la plupart ont récemment disparus (7 zones d'étangs avant 1793). Autant dire que l'aspect général actuel est assez fondamentalement différent de ce qu'il était, il y a moins de deux siècles.

  

  On sait que nos ancêtres s'appelaient les Ambarres, petit peuple celte coincé entre des peuples celtes eux aussi mais très puissants, les Eduens, les Séquanes, les Ségusiaves et les Allobroges. Les Ambarres ont laissés leur trace avec les toponymes,  Ambérieu, Ambutrix, Ambronay par exemple, faute d'une littérature historique sérieuse. Très tôt inclus dans la colonie de Lugdunum (Lyon) ils furent parmi les premiers romanisés. Jules César dans sa première intervention de la Guerre des Gaules les a débarrassé des Helvètes en détruisant l'arrière garde  de ceux-ci entre Sathonay et Thoissey. Ce fut l'origine de la romanisation de la Gaule Chevelue ou Celtique en -58 avant notre ère.

  

 

  Chaneins se trouvait sur une voie romaine secondaire partant de Montmerle sur Saône vers l'est par Châtillon sur Chalaronne, Bourg jusqu'à Genève puis le Mont Cenis et Aoste en Italie, un cheminement important sur l'axe commercial et militaire Nord Sud bien développé à partir du règne de l'empereur Claude dans les années 60 de notre ère. La période dite de la Paix Romaine du II ème siècle n'a pas laissé de traces monumentales ni écrites connues à ce jour mais c'est au plan religieux, lorsque naissent les premières paroisses rurales que le christianisme entre en concurrence avec les cultes païens (de pagani: paysans) et qu'on constate le début d'une organisation territoriale à partir de l'évêché de Lyon qui fut au début le seul évêché de la Gaule et plus tard dans une moindre mesure de celui de Mâcon. Dans un premier temps la christianisation sera très lente et minoritaire dans le monde rural par rapport aux cultes traditionnels de la Nature, caractéristiques des peuples celtes.

  

  L'arrivée des Burgondes au V ème siècle va conduire à une modification de la démographie et de la propriété terrienne avec un partage des terres avec de nouveaux venus, germanisés mais globalement respectueux du système juridique et foncier romain. La Loi des Burgondes édictée à Ambérieu (en Dombes ou en Bugey?) dite aussi Loi Gombette a pu s'appliquer à Chaneins avec un partage des terres et le nom de Chaneins est peut être en rapport avec un burgonde du nom de Kânn ou Châne avec l'indication «ensium» suffixe bas latin désignant le lieu dit ou le domaine. Le même système peut expliquer Baneins (anciennement Anthaneins) ou Valeins. Le premier royaume de Bourgogne ou de Burgondie ne durera qu'un siècle (V-VI ème siècles)et les apports burgondes seront rapidement assimilés dans la population gallo-romaine.  Ce sont les Francs venus du Nord qui vont devenir maîtres de la région sans d'ailleurs s'en occuper sérieusement sauf en installant des points militaires de contrôle dont plus tard certains châteaux en carrons seront les successeurs et c'est alors que le mouvement monastique va prendre le devant de la scène.

  

  D'abord l'action de Saint Martin de Tours et de ses moines évangélisateurs du Vème siècle, va être puissante dans la région avec pour preuve 65 paroisses ou chapelles dédiées au Saint, par exemple à Baneins au plus près. Les paroisses rurales sont organisées et multipliées par les abbayes lyonnaises (Ainay, L’Île-Barbe, Saint Pierre)  et Saint Oyend de Joux (futur Saint Claude) et plus près Montberthoud (Savigneux), Cluny, Saint Philibert de Tournus, à partir des grands domaines ruraux et regroupées en archiprêtrés. Des prieurés ruraux sont constitués dont celui de Neuville dépendant de l'abbaye de Saint Claude dont l'influence sera prédominante à Chaneins puisque le prieur de Neuville puis la Prieure après 1750 seront  curé primitif de la paroisse et jusqu'à la Révolution de 1789  nominateur à la cure. Vers 550, l'ermite Treverius meurt  dans la forêt à Saint Trivier en Dombes. A Thoissey, Desiderius meurt martyr en 604 dans le lieu qui deviendra Saint Didier sur Chalaronne. On peut admettre qu'avant l'église actuelle de Chaneins, un sanctuaire plus modeste a précédé, entouré d'un Champ des Morts réunissant ainsi les familles et unifiant les destinées des habitants autour du lieu de culte et des défunts. C'est l'origine du bourg, sans doute liée également à la croisée de chemins commerciaux plus anciens, à la présence de puits facilement utilisables et permanents sans oublier quelques artisans indispensables, maréchal-ferrant, charpentier, tisserand…

  

  Les hameaux principaux ont une origine aussi ancienne avec comme base des domaines ruraux plus modestes sauf Beybleu  (Beyblès dans un texte du XI ème siècle en 1093 , où il est question de l'achat de la condamine d'Ermengarde par deux soldats ou miles, située à l'emplacement du Prieuré de Beybleu) qui semble avoir été très tôt actif, bénéficiant de la présence de la Calonne et de l'existence probable d'un moulin hydraulique. On peut le considérer comme un village avec quelques extensions sur Bassereins dont le nom évoque un possible propriétaire de l'époque burgonde. Il existait depuis longtemps des petits domaines isolés comme le Merle, le Verne, Le Rocher, Boulliaque ou les Vermillères et sans doute bien d'autres disparus de la mémoire collective et de la toponymie, Montgardon par exemple ou la Grange Belle. Montessuy proche du bourg, paraît une extension plus tardive correspondant à une crue démographique et favorisée par la présence d'une nappe phréatique assez accessible avec des puits individuels et une exposition moindre aux brouillards chroniques engendrés par les étangs des creux.

  

Finalement la période franque du VII ème au IX ème siècle n'a pas laissé de marques importantes à Chaneins. Il n'y a pas de référence aux invasions, sarrasines ni normandes sauf peut-être celle des Hongrois, les Ogres des légendes bressanes et dombistes et c'est alors à partir du X ème siècle sans doute, qu’apparaît la poype des Chabaudières. Les poypes sont des monticules artificiels en forme de mamelles (du latin poppa ou puppa: pis de vache) fréquents dans le Lyonnais, la Bresse, la Dombes et le Dauphiné que les archéologues attribuent aux X ème, XI ème et XII ème siècles. On les appelle dans toute l'Europe des mottes castrales, fortifications de terre rapportée, protégées par des fossés, en forme de tronc de cône dont la plate-forme était protégée par des palissades défensives en bois. La plate-forme portait une tour de défense en bois, ancêtre du donjon et diverses constructions également en bois servant d'abris et de magasins. L'espace entre la plate-forme et la palissade extérieure s'appelait la basse-cour avec d'autres constructions constituant un petit village destiné à accueillir la population en cas de menace. Outre celle des Chabaudières, il reste dans l'Ain environ 50 autres poypes. Le mot poype est un mot francoprovençal ou arpitan, langue romane parlée du Forez au Valais en Suisse, dans la grande région lyonnaise, dans le Dauphiné et la Savoie, qui avec la langue d'oil et la langue d'oc a donné naissance au français moderne. C'était donc la langue des anciens chaninois.

  

  La poype des Chabaudières est  le premier emplacement du château fortifié de Chaneins. Le château proprement dit en dur, fut construit un peu plus au nord à l'emplacement dit le Château-Vieux du cadastre de 1830. Un des seigneurs, Jean de Chaneins, sans doute de la famille des Riottier, seigneurs  primitifs de Chaneins, passa de nombreuses années dans les geôles du Château de Saint Trivier. Il n'en reste rien de visible et il semble qu'il fut rapidement ruiné, après la prise de Chaneins en 1434, le seigneur ultérieur, le Comte de Saint Amour n'y résidant pas. Une construction du XVII ème de type maison bourgeoise, l'a remplacé au nord-est avec un corps central et deux ailes dont une est jouxtée par un pigeonnier. La ferme carrée attenante contient d’intéressants détails du XVI ème.

  

  Le site de Chaillouvres est signalé dès 1080 dans une charte qui parle d'un Guy de Chaillouvres dont la famille s'éteint au XIV ème siècle avec Guichard de Chaillouvres dont l'une des filles épouse Perceval Le Merle seigneur de la Franchise à Dompierre sur Veyle. En 1551, la veuve de Jean Kleberger  dit le Bon Allemand, Pelonne de Bonsin acquiert Chaillouvres. Plus tard, le propriétaire est Claude François de Joly, baron de Langes, seigneur de Choin, bailli de Bresse et gouverneur de Bourg en Bresse pour le Roi de France.Un chaninois était juge-châtelain et y résidait. En 1789, le seigneur est un Marron de Belvey. La seigneurie de Chaillouvres couvrait donc une part importante à l'est de Chaneins et la plus grande partie de Valeins.

  

  Le château a des bases du X et XI ème siècle. Situé au point culminant de la commune, il a joué un rôle éminent de surveillance et de défense de la «Porte de Dombes», appellation souvent associée à Chaneins, du fait de  sa construction en «carrons savoyards» au XIV ème siècle. Il est  dans un excellent état de conservation grâce à une restauration soignée de 1853. Le donjon est évidemment très caractéristique de l'architecture militaire en Dombes. Le territoire était alors fortement boisé et le bois a été utilisé pour la fabrication des carrons, ce qui nécessitait d'énormes quantités de combustible, laissant après déboisement des prairies et des étangs, dont l'étang Prêle, dont la superficie était double de l'actuelle.Au nord, deux étangs créés à partir des sources de la Calonne servaient aussi de défense.

  

  Situé actuellement sur Montceau mais lié historiquement à Chaneins, le Château de la Bâtie est un château-fort du XIII ème siècle construit en carrons par les seigneurs de Beaujeu et qui possédait la partie ouest des terres de Chaneins avec principalement Beybleu et Bassereins mais la seigneurie s'étendait sur la quasi totalité de Montceau, D'abord simple seigneurie en fief-lige des Beaujeu, elle fut érigée en baronnie puis en comté de la Bâtie dont le titulaire De Champier fut souvent gouverneur de la Dombes en l'absence du prince-souverain. Madame de Sévigné a eu l'occasion d'y résider et en a laissé une lettre saisissante sur l'état désastreux des routes de son temps. Lors des visites pastorales de l'archevêque de Lyon, le maître de la Bâtie recevait le prélat pour le repas et le gîte, ce dernier prenait bien soin de rappeler à cette occasion que l’église paroissiale était le lieu normal du culte et non la chapelle castrale de la Bâtie. Preuve s'il en est besoin que c'est la paroisse qui a été à l'origine de la délimitation de la commune, comme le montrent aussi les archives des baptêmes, mariages et décès que nous devons aux curés successifs de Chaneins. Après la Révolution, le château de la Bâtie dont les Vidaud de Latour étaient propriétaires passa par héritage au marquis de Chabannes très présent dans la vie de Chaneins.

  

  Le Château de Tavernost sur l'ancienne commune de Cesseins, aujourd’hui Francheleins est situé en limite sud de Chaneins et possédait une partie des terres au sud de la commune. Une première construction date de 1285 et fut d'abord une maison-forte jusqu'au XV ème siècle, possédée par Philibert de Francheleins en 1344 qui se reconnaît vassal du Seigneur de Beaujeu puis  par Josserand de Francheleins puis par les Andrevet d'Amareins. En 1492, il semble que le Duc de Savoie reprend la souveraineté directe de Tavernost et le reconstruit dans le cadre de la défense de ses terres contre le Roi de France. C'est ensuite le souverain de Dombes qui en devient maître, ce qui  vaudra au château d'être incendié en 1593 lors des guerres de la Ligue. Un de ses propriétaires, Jacques Gayot lui donne au XVIII ème son aspect actuel en supprimant deux des quatre tours et en construisant le grand corps actuel. La famille des Bordeaux de Lurcy lui succède jusqu'à  la Révolution. Au XIX ème, il entre alors dans la possession des comtes de Varax.

  

  Les modestes seigneurs locaux doivent se soumettre à des puissances féodales supérieures. Les seigneurs de Beaujeu à partie de 1050 s'étendent sur les deux rives de Saône avec l'intention précise de contrôler le trafic fluvial et de percevoir les péages {Trévoux, Beauregard, Montmerle, Thoissey}. C'est alors qu'on commence à parler du «Beaujolais à la part de l'Empire» qui sera beaucoup plus tard appelé la Dombes (après 1565), d'abord l'archidiaconé au plan religieux puis la souveraineté de Dombes. Chaneins passe en 1234 de la suzeraineté des Sires de Villars à celle d'Humbert de Beaujeu.  Les petites villes alentour reçoivent des Chartes de Franchise pendant le XII ème et XIII ème siècle, Saint Trivier en 1253, tandis que les communautés rurales sont régies par les Coutumes de Dombes jurées et officialisées par l'Assemblée des Seigneurs de Dombes, réunis dans l'église de Chaleins en 1325.

  

  Les guerres féodales sont illustrées  par deux batailles de Chaneins notables. En 1325, lors de la première bataille de Chaneins, le Seigneur de Beaujeu combat victorieusement le Seigneur de Villars qui au nom du Comte de Savoie s'oppose à lui. Beaujeu porte les limites de la Dombes à la rive gauche du Moignans et à la rive gauche de la Chalaronne, frontières encore actuelles de la Grande Dombes. En 1434 seconde bataille, le Duc de Bourgogne allié de la Savoie, prend Chaneins, Tavernost, Chavagneux, Chaillouvres, Chaleins et Bezeneins au Duc de Bourbon, Seigneur du Beaujolais. De nouvelles agressions bressanes  ont lieu en 1441 contre la Dombes. Chaneins fait alors partie de la Châtellenie de Montmerle et fournit de ce fait des soldats pour le défense du Château de Montmerle qui permet au sire de Beaujeu de contrôler le trafic de la Saône, principal axe commercial Nord Sud. Le 14 ème siècle fut à Chaneins comme toute la région marqué par la Grande Peste Noire de 1347 -1349, qui tua le tiers de la population globale, laquelle eut encore à subir les «Tard-Venus», soldats brigands des Grandes Compagnies qui occupèrent les vallées de la Saône et du Rhône en 1362-1363.

  

  De 1523 à 1560, la Dombes est rattachée à la France pour la première fois, suite au passage de son souverain, le Connétable de Bourbon au service de Charles-Quint. Chaneins est alors à la fois sous la juridiction directe du Roi de France et sous la dépendance religieuse de l'archevêque de Lyon. Une partie de la noblesse dombiste passe au calvinisme et en particulier les seigneurs de Challiouvres qui cessent alors d'entretenir leur chapelle funéraire dans l'église paroissiale de même que les seigneurs de Tavernost. Les calvinistes sont en fait surtout actifs dans les petites villes et la grande majorité de la population rurale reste étrangère aux guerres de religion. Après le retour de la Dombes à son souverain légitime en 1561 et son indépendance, avec Louis de Bourbon-Montpensier, François, Henri et à sa fille Marie, c'est en fait la guerre entre Henri IV et le Duc de Savoie qui va être une période dramatique. Les troupes françaises et savoyardes ravagent la région pratiquant les unes et les autres la politique de la terre brûlée, laissant ruines et misère pour plusieurs générations après le rattachement de la Bresse, du Bugey, Valromey et Pays de Gex à la France par le Traité de Lyon de 1601. Chaneins est alors la Porte de la Dombes du côté de la Bresse, porte d'entrée d'un minuscule pays indépendant entouré de tous côtés par la France. Il faudra largement plus d'un demi-siècle pour reconstruire et beaucoup de nos fermes actuelles datent du fait, de la fin du XVII ème siècle, dans le style dombiste des fermes en U, le corps principal généralement exposé à l'est. Le matériau prépondérant avec le pisé est le galet roulé et le tuileau de récupération, par manque de pierre, réservée aux éléments ouvrants. Les toitures sont alors systématiquement en tuile ronde, fabriquée dans les nombreuses tuileries ou «carronnières» avec le carron savoyard.

  

  Grâce aux visites pastorales des archevêques de Lyon dans la Paroisse Notre Dame de Chaneins de Denys de Marquemont  en 1614 et de Camille de Neuville de Villeroy en 1654, on sait quelques petites choses sur la population  et ses comportements religieux. Les curés semblent actifs et instruits. La population pratique régulièrement la vie religieuse et le cimetière autour de l'église est dans un état correct. L’église a l'aspect des églises romanes de Dombes, avec de nombreuses reprises gothiques tardives, un clocher dit turbine, de faible hauteur au dessus du transept, les chapelles intérieures sont dans un état médiocre car dévolues aux sépultures des familles seigneuriales, celles-ci les négligent. La nef possède une travée de moins qu'actuellement, sans porche et l'entrée est précédée d'une galonnière, lieu de rencontres et d'échanges pour les habitants. Il existe alors à l'est, une chapelle extérieure dite cémétérale, destinée à la réception temporaire avant inhumation, des paroissiens décédés, surtout en période de peste, Grande Peste Lyonnaise de 1628-1629 en particulier, et placée sous le vocable de Saint Antoine ermite. La place de l'église est alors un lieu important de sociabilité et convergence des chemins, avec la galonnière, le cimetière, le presbytère, et ce qu'on peut interpréter comme la Grange Dîmière avec ses deux portes, charretière et piétonne. La dîme, impôt ecclésiastique, se payait en nature et il fallait un local pour emmagasiner les fruits des récoltes. A noter que les chaninois comme tous les dombistes ne payait aucun impôt direct en particulier «la taille». De même, pas de «gabelle» ou la «petite gabelle» pour le sel.

  

  Nous avons de nombreuses informations grâce aux documents d'archives qui dès le XVII ème siècle nous apporte quelques informations précises sur l'état de Chaneins et de sa population au temps de Louis XIV et de la Grande Mademoiselle, duchesse de Bourbon-Montpensier, fille de Marie et de Gaston d'Orléans, souveraine de la Dombes. La paroisse Notre Dame de Chaneins en Dombes comporte environ six cents habitants avec quelques variations. Le Bourg regroupe les artisans, les professions dites libérales et quelques rentiers et un ou deux nobles. On repère un boulanger, un maître cordonnier, un tailleur d'habits, au moins un maréchal-ferrant, un maître-charpentier, plusieurs tisserands ou tixiers de toile de Châtillon mais aussi, une sage-femme, un barbier chirurgien, un puis deux notaires et praticiens du droit. Les hameaux périphériques que l'on appelle alors les «mas» que ce soit Beybleu, Chaillouvres, Montessuy, Bassereins, Le Rocher, le Merle sont essentiellement agricoles et on entend maintenant parler des «laboureurs» qui sont fermiers alors que des propriétaires terriens et exploitants acquièrent la qualité «d'honnête Untel» et bientôt   «monsieur» Untel et «dame» Unetelle. On découvre une population de plus en plus mobile de saisonniers, de «manouvriers» et de femmes de peine venant de toutes les paroisses de Dombes, du duché de Savoie,  de la Bresse, du Bugey, du Beaujolais et du Lyonnais.

  

  Apparaissent des noms de famille qui vont rester jusqu'à nous, Odet, Depeupière, Gatheron, Berthelon, Charvériat... Vers 1675, quelques hommes commencent à savoir signer et un peu plus tard vers 1700, des femmes signent régulièrement comme témoins d'actes d'état-civil.  La longévité des adultes est souvent proche de celle que l'on connaît au début du XX ème siècle. Une centenaire est attestée en 1694 mais le fait fondamental est l'énorme mortalité infantile sans doute supérieure à 50 pour cent associée à la mortalité maternelle très anormale pendant la période des grandes famines de la fin du XVII ème mais la mortalité infantile élevée est une constante jusqu'au XIX ème siècle. L'aspect général est celui d'un village de bocage avec de nombreux petits champs délimités par des haies vives, vallonné, où la polyculture est la règle. Plusieurs vignes s'étendent sur les versants orientés à l'ouest: Vieilles Vignes sur Montessuy et Chaillouvres,Vignes Neuves au Rocher, Vignes du Comte à Beybleu. Dans les creux près des serves et des petits étangs, on trouve des chènevières pour le chanvre que l'on fait rouir sur les berges des étangs et des serves en application du droit de rouissage spécifique à la Dombes. Des chènevières de plein champs se trouvent à Beybleu sur la rive gauche de la Calonne. Blé, orge, avoine et seigle alternent mais on commence à planter du maïs pour alimenter le bétail. En dehors des deux étangs de Chaillouvres, des étangs Prêle et Vavre, il en existe un à l'entrée du bourg entre le Chemin Neuf et Chabian, un autre en limite de Monceaux et au moins deux petits vers la Croix Blanche non documentés. Les chemins restent ruraux et sans entretien. Ces chemins sont très différents de la route actuelle et contournent le territoire actuel de la commune sans ligne droite. On vient alors de Montceau par Saint Maurice, le Bois d'Y, de Baneins par le nord de Chaillouvres, les Chabaudières et les Verchères, de Saint Trivier par le Michelard, les Vermillières et la Croix Blanche.Il faudra attendre la Route Royale après 1762 pour avoir l'aspect actuel, qui sera alors carrossable, plantée d'arbres et deviendra la Départementale actuelle. Le bétail (bovins et caprins) est assez modeste faute de prairies et se trouve souvent le long des chemins selon le droit de paissage, autre privilège de la Dombes. Les bœufs servent à la culture et quelques rares chevaux se rencontrent chez les plus aisés.

  

  Au XVIII ème siècle, du fait d'un troisième droit spécifique à la Dombes humide, le droit de naissage, autorisation pour tous de planter, faire pousser le chanvre en bordure des étangs et de le récupérer,  il se constitue une activité  importante de travail du chanvre conduisant à l'installation de nombreux tisserands travaillant à domicile et en famille, les tixiers qui sont au moins une bonne dizaine dans la paroisse et peuvent utiliser les bras d'«émigrants» venus des villages du bord de Saône et du Beaujolais, Propières, Cublize et du Mâconnais, qui vont devenir sédentaires et faire souche. Le produit fini est la toile de Châtillon qui a un grand succès régional et très utilisée pour l'usage domestique et la sellerie dont Châtillon est déjà un centre actif. Cette activité est bien évidemment en rapport direct avec la présence de nombreuses surfaces en eau, on dit en évolage. Le poisson des étangs a l'avantage de constituer une source de protéines bon marché, aisément accessible et de faire l'objet d'un commerce régional surtout sous forme de poisson séché et fumé. La diversité des activités agricoles et artisanales fait de Chaneins un village d'échanges et d'implantation de nouveaux habitants contrairement à l'image traditionnelle d'un territoire refermé sur lui-même à l'écart du courant du siècle. On relève la présence d'un boucher, d'un boulanger, d'un meunier, d'un cordonnier,  d'un mercier, de deux tailleurs d'habits, d'une sage-femme  et d'un maître chirurgien. La paroisse utilise les services d'un tireur de cordes ou sonneur et d'un marguillier ou sacristain. On enregistre l’appellation de plusieurs chaninois qualifiés de «bourgeois», c'est à dire d'anciens artisans retirés, vivant à Chaneins de leurs rentes ou de leurs locations. Signe paradoxal d'une situation économique en expansion, les archives signalent plus souvent les décès de«pauvres passants» dont on ignore souvent le nom et l'origine. La Charité de Lyon confie quelques enfants à des nourrices locales. Un autre phénomène important est l'apparition de plusieurs propriétaires terriens qui achètent des granges c'est-à dire des fermes aux nobles, Tavernost, Chaillouvres et au comte de la Bâtie. Souvent non résidents à Chaneins ou même lyonnais, ils font exploiter leurs nouveaux biens par des grangiers issus de la Dombes environnante qui vont s'intégrer dans la population d'origine en quelques générations. Les Augustins Déchaussés de la Croix Rousse à Lyon acquièrent une importante résidence à Beybleu en 1725 qui deviendra le Prieuré de Beybleu et apportent leur aide au curé du lieu lorsqu'il est indisponible ou malade.

  

  En 1762, par un échange entre le Comte d'Eu, second fils du Duc du Maine, dernier prince souverain de Dombes et le Roi Louis XV, la Dombes et Chaneins deviennent français sans aucune forme de consultation des dombistes. Le Parlement de Trévoux est supprimé. En principe, les privilèges étaient maintenus mais en 1782, la Dombes est rattachée à la Bresse et placée sous la juridiction du Parlement de Dijon et de l'Intendant de Bourgogne. Une conséquence pratique importante est la construction de nouvelles routes royales par les ingénieurs des Ponts et Chaussées avec le tracé rectiligne de la Route de Baneins à Chaneins et de Chaneins à Montmerle remplaçant les chemins sinueux et défoncés et  créant la Grand Rue du Bourg que nous connaissons. Le centre d'activités principal se trouve alors déplacé à la croisée au détriment de la place de l'église. La Carte de Cassini illustre cette importante transformation et l'assainissement du plateau est du Bourg débarrassé de zones marécageuses aux eaux stagnantes. La population est alors de plus de six cents habitants fixes sans compter les saisonniers et les valets des deux sexes qui sont recrutés annuellement à la Saint Martin en provenance de la grande région. On peut risquer le chiffre de cinquante à cent le nombre de ces chaninois temporaires mais les actes de sépulture témoignent de leur importance numérique et de leur forte mortalité.Le XVIII ème siècle est aussi marqué par un fait nouveau, c'est le remariage fréquent des veufs et des veuves peu pratiqué au siècle précédent, signe d'évolution des mentalités sociales et  économiques.

  

  La qualité de français s'accompagne alors pour la Dombes et Chaneins de quelques inconvénients en particulier sur le plan fiscal avec l'application de la taille, de la gabelle à prix forts, de droits indirects douloureux comme la marque sur le cuir et au plan administratif et judiciaire, la pratique de l'administration et de la justice royales particulièrement déplaisante pour les habitants d'un ancien pays indépendant qui prenaient facilement leurs aises du temps du Prince Souverain de Dombes. Aussi, on n'est pas surpris que lorsqu' arrive la convocation des États Généraux de 1789, les chaninois s'empressent de faire connaître leurs Doléances. Le dimanche 3 mars 1789, l'assemblée dominicale des habitants mâles de plus de 25 ans, convoquée comme à l'accoutumée sur le devant de l'église par le curé Claude Faure et présidée par le juge châtelain de Chaneins Jacques George, désigne les deux députés de la paroisse qui devront porter à Trévoux le fameux Cahier de Doléances, Jean Chaillon est un propriétaire exploitant et Claude Faure, le curé de la paroisse. La commission de rédaction est composée de résidents,  âgés de plus de 25 ans donc majeurs, selon la législation du temps, imposables et désignés par le vote démocratique sans doute à mains levées. Leurs noms méritent d'être connus car ils seront pour beaucoup d'entre eux actifs dans l'histoire locale. Outre les deux désignés députés ce sont: Pierre Berthelon, Benoît Berthelon, Jean Toussaint dit Pupire, Claude Marboud, Claude Rousset, Benoît Foret ou Forest, Pierre Dupond, Jean Large, Jean Gravier, Marc Michaud, Louis Sendron et Benoît Charvériat. Ces quatorze personnes représentent 108 feux ou foyers fiscaux soit plus de 600 habitants. Le secrétaire est bien sûr Jacques George, le juge châtelain qui donne sa signature officielle au document historique qui va être maintenant pour la première fois, transcrit dans son intégralité.

  

CAHIER DE DOLEANCES DE CHANEINS. SOMMAIRE.

  

PREMIEREMENT. RECUEILLIR LES SUFFRAGES PAR TETE, LES 3 ORDRES REUNIS.

 

2° DE DEMANDER UNE NOUVELLE CONSTITUTION DE LA MONARCHIE.

 

3° UNE REFORME DANS L'ADMINISTRATION DES FINANCES.

 

4° DEMANDER UNE SIMPLE IMPOSITION PAYABLE EN NATURE.

 

5° QUE LES DEUX ORDRES SUPERIEURS PAYENT LES IMPOSITIONS AU PRORATA DE LEURS BIENS TANT POUR LA TAILLE QUE POUR LES CORVEES.

 

6° QUE LES DENIERS SOIENT VERSES CHEZ LE RECEVEUR DE LA PROVINCE POUR ETRE TRANSPORTES DIRECTEMENT AU TRESOR ROYAL.

 

7° LA SUSPENSION DES AIDES, GABELLE, MARQUE DU CUIR ET QUE LA DOMBES NE SOIT PLUS SURIMPOSEE POUR LE SEL.

 

8° DEMANDER LA SUPPRESSION DE TOUS LES PEAGES.

 

9° ETABLIR DES ASSEMBLEES PROVINCIALES LA OU ELLES NE SONT PAS ENCORE ETABLIES.

 

10° QUE LES ETATS GENERAUX SOIENT ASSEMBLES TOUS LES CINQ ANS.

 

11° QUE LA QUOTITE DE LA DÎME SOIT UNIFORME ET QU'ELLE SOIT EMPLOYEE SEULEMENT POUR L'ENTRETIEN DES PASTEURS DU PREMIER ET DU SECOND ORDRE ET POUR LES EGLISES ET EDIFICES EN DEPENDANT ET POUR LES BESOINS DES PAUVRES DE CHAQUE PAROISSE AFIN DE DETRUIRE ENTIEREMENT LA MENDICITE.

 

12° DE DEMANDER DE DETRUIRE LA VENALITE DES CHARGES ET DE CHOISIR LES OFFICIERS DE LA JUSTICE DANS LES 3 ORDRES ET PAR LE MERITE, DE RAPPROCHER LES TRIBUNAUX DES JUSTICIABLES, DE SIMPLIFIER LA FORME DE L'INSTRUCTION DES AFFAIRES PAR UN NOUVEAU CODE CIVIL ET CRIMINEL.

 

13° REDUIRE LES POUVOIRS DES PARLEMENTS AU SIMPLE DROIT DES JUGES.

 

14° QUE LA NOBLESSE SOIT PERSONNELLE.

 

15° DE REVENIR SUR TOUS LES EMPRUNTS USURAIRES AINSI QUE SUR LES ECHANGES FAITS CONTRE LES INTERETS DE L'ETAT.

 

17° DE SUPPRIMER TOUTES LES PENSIONS ET RETRAITES AU MINISTRE ET A TOUTE PERSONNE QUI A UNE FORTUNE SUFFISANTE.

 

18° SUPPRIMER TOUS LES INTENDANTS, FERMIERS GENERAUX ET RECEVEURS.

 

19° FIXER UN DROIT MODIQUE ET INVARIABLE SUR CHAQUE ACTE JUDICIAIRE POUR EN ASSURER L'EXECUTION ET LA LEGALITE.

  

  La simple lecture de ce document essentiel permet de savoir que les chaninois de 1789 ont une très bonne connaissance des questions de politique générale en mettant en évidence leur demande pressante de réformes  en matière d'organisation de l’État, de l'Administration, des Finances Publiques, de la Fiscalité Directe et Indirecte, du fonctionnement des Cultes, l'égalité de tous les citoyens devant l'impôt comme dans la plupart des Cahiers de Doléances, avec précision et clarté. Au plan  des doléances locales, on sent aussi combien l'intégration dans le royaume de France a pu amener de déception  et de rancœur et  le curé Claude Faure prêche pour sa paroisse en souhaitant se débarrasser de la tutelle  des Dames de Neuville tandis que le juge châtelain, modeste juriste, fait insérer son rêve de pouvoir accéder à des fonctions juridictionnelles de plus haut niveau. Le chapitre suivant traitera de la période moderne de 1789 à nos jours.

Un peu d'histoire

En bordure de la Côtière de Saône, la commune se trouve au cœur de l'ancienne Forêt primaire de la Dombes qui a progressivement disparu au cours du dernier millénaire laissant la place à des « essarts » propres à la culture classique des céréales, à des prés permettant l'élevage et le « paissage » des animaux d'embouche, enfin à la vigne et le chanvre à proximité des étangs. Le sol argilo-calcaire lié à son origine morainique, a en effet permis, au Moyen-Age, la constitution de nombreux étangs artificiels dont la plupart ont récemment disparu (7 zones d'étangs avant 1793). Autant dire que l'aspect général actuel est assez fondamentalement différent de ce qu'il était, il y a moins de deux siècles.
 

On sait que nos ancêtres s'appelaient les Ambarres, petit peuple celte coincé entre des peuples celtes eux aussi mais très puissants, les Eduens, les Séquanes, les Ségusiaves et les Allobroges. Les Ambarres ont laissés leur trace avec les toponymes (Ambérieu, Ambutrix, Ambronay par exemple), faute d'une littérature historique sérieuse. Très tôt inclus dans la colonie de Lugdunum (Lyon), ils furent parmi les premiers romanisés. Jules César dans sa première intervention de la Guerre des Gaules les a débarrassé des Helvètes en détruisant l'arrière garde de ceux-ci, entre Sathonay et Trévoux. Ce fut l'origine de la romanisation de la Gaule Chevelue en -58 avant notre ère.
 

Chaneins se trouvait sur une voie romaine secondaire partant de Montmerle sur Saône vers l'est par Châtillon sur Chalaronne, Bourg jusqu'à Genève puis le Mont Cenis et Aoste en Italie ; un cheminement important sur l'axe commercial et militaire Nord Sud bien développé à partir du règne de l'empereur Claude dans les années 60 de notre ère. La période dite de la Paix Romaine du 2ème siècle n'a pas laissé de traces monumentales ni écrites connues à ce jour mais c'est au plan religieux, lorsque les premières paroisses rurales que le christianisme entre en concurrence avec les cultes païens (de "pagani" : paysans) qu'on constate le début d'une organisation territoriale à partir de l'évêché de Lyon et dans une moindre mesure de celui de Mâcon. Dans un premier temps, la christianisation sera très lente et minoritaire dans le monde rural par rapport aux cultes traditionnels de la nature caractéristiques des peuples celtes.
 

L'arrivée des Burgondes au 5ème siècle va conduire à une modification de la démographie et de la propriété terrienne avec un partage des terres et de nouveaux venus germanisés mais globalement respectueux du système juridique et foncier romain. La loi des Burgondes édictée à Ambérieux (en Dombes ou en Bugey ?) dite aussi Loi Gombette a pu s'appliquer à Chaneins avec un partage des terres. Le nom de Chaneins est peut-être en rapport avec un burgonde du nom de Kânn ou Châne avec l'indication « ensium » suffixe bas latin désignant le lieu-dit ou le domaine. Le même système peut expliquer Baneins (anciennement Athaneins) ou Valeins. Le premier royaume de Bourgogne ou de Burgondie ne durera qu'un siècle et les apports burgondes seront rapidement assimilés dans la population gallo-romaine. Ce sont les Francs venus du Nord qui vont devenir maîtres de la région sans d'ailleurs s'en occuper sérieusement et c'est alors que le mouvement monastique va prendre le devant de la scène.

Armoiries de Chaneins
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Les armoiries de CHANEINS se blasonnent d'un écu tiercé en pairle renversé en 3 quartiers :

  • Au premier quartier en haut à gauche ou à dextre : d'or au lion contourné de sable, armé et lampassé de gueules, au lambel sur la joue de quatre pendants de gueules, pour le seigneur de Beaujeu.

  • Au second quartier en haut à droite ou senestre : de gueules au lion d'or moucheté de sable pour le Prieur de Neuville.

  • Au troisième quartier en bas ou en abyme : bandé d'or et de gueules de 6 pièces pour le seigneur de Villars.

Placée sous le vocable de Notre Dame de l'Assomption, cette église, mentionnée dès 1234, dépendait du prieur de Neuville les Dames.

Au-delà du clocher néogothique, l'église s'ouvre sur une nef, replafonnée en 1900, adjointe de quatre chapelles latérales.

L'abside en cul-de-four, sans doute du XII° siècle, offre une alternance de cinq arcades inégales en plein cintre séparées par des colonnettes surmontées de chapiteaux ornés de figurations végétales de feuille d'eau et de feuilles d'acanthe.

A l'extérieur, en façade sud, trois gargouilles du XV° siècle représentent des animaux grotesques.

La restauration de la toiture et des murs sera achevée fin 2006, redonnant tout son lustre à cette église romane.

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Chœur de l'Eglise.

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Chapelle de la Vierge Marie

L’église de Chaneins, placée sous le vocable de Notre Dame de l’Assomption, est située au cœur du village. Elle a été enfin rendue au culte le 24 mars 2014 après 10 ans de travaux.

Ce patrimoine ancien (XIIème siècle), important pour la commune, a été restauré avec l’aide de l’Etat, de la collectivité et de l’association paroissiale.

Les travaux ont été supervisés par Mme Penez, conservatrice des antiquités et objets d’art de l’Ain et par M. Cattin, ancien directeur des archives de l’Ain, et suivis par le cabinet d’architecture Barillot. Le Maître d’ouvrage était représenté par G. Charveriat, conseiller municipal de la commune de Chaneins.

Nous vous invitons à visiter maintenant cette église en commençant par l’extérieur...

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L'église était antérieurement entourée d’un cimetière transféré à l’entrée ouest du village ; seules traces subsistantes : deux pierres tombales appuyées aux murs sud (famille Berthelon) et nord (famille Charveriat).

Comme beaucoup d’églises de notre région elle a été profondément modifiée au cours des siècles ; romane (XII è siècle) dans sa partie la plus ancienne l’abside, gothique (XVIe siècle) pour les chapelles, on lui a adjoint au XIX è siècle un clocher néo gothique. 

Les récents travaux de restauration extérieur ont fait ressortir toute la beauté de cette église en faisant apparaitre partout où cela était possible les carrons, les pierres , les galets et les belles fenêtres gothiques des trois chapelles.

L’ancien clocher roman carré se trouvait à la jonction  de l’abside et de la nef ; menaçant ruine il fut démoli en 1864 et remplacé par l’actuel clocher.

Partant du perron par la droite on découvre au sommet du mur sud trois   importantes gargouilles en calcaire jaune ; ces animaux grotesques (XV è siècle)  servaient à l’écoulement des eaux de pluie ; ils étaient alimentés par une rigole en pierre dissimulée maintenant sous la toiture, elle-même remaniée à plusieurs reprises.

En dessous se trouve la très belle fenêtre gothique de la chapelle Saint Joseph, puis encadrée par un mur alternant galets et carrons celle de la chapelle de la Vierge.

Poursuivant notre tour nous longeons l’ancien presbytère pour atteindre le chevet roman (XII è siècle) soutenu par  2 contreforts ; il est recouvert de tuiles écailles et l’arase est ceinte d’une corniche sobrement moulurée ; remarquons parmi les modillons soutenant la corniche une tête d’angelot. On remarquera les cinq fenêtres en plein cintre dont  seulement trois en pierre sont d’origine.

Le mur nord est agrémenté par les  deux très belles fenêtres gothiques des chapelles Saint Roch et Saint Benoit enchâssées dans un mur en galets et carrons.

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Nous allons ensuite visiter l’intérieur...

En forme de croix latine l’église, toute simple et plafonnée, mesure 37 m de long et 10/15 m de large.

Une porte permet d’accéder au clocher qui héberge 2 cloches : l’une Zoe de 848kgs et l’autre de 402 kg fondues en 1837.

Si l’on part du fond de l’église on remarquera à droite un bénitier octogone en pierre et à droite les fonts baptismaux en forme de coquille Saint Jacques  puis on arrive aux chapelles.

A droite Saint Joseph la plus remarquable des chapelles gothiques est recouverte du haut en bas de peintures d’une fraicheur remarquable, découvertes lors des sondages effectués en 2001 et inscrites depuis à l’inventaire supplémentaire de la liste des objets classés .Les deux importantes tables en pierre gravées  comportent une petite énigme ; en effet l’inscription latine se termine par le texte suivant :si tu veux connaitre l’auteur de cette œuvre   prend la 1è lettre de chaque ligne (Johannès Chabodus sacerdos magister hoc horatorium fieri fecit 1505 MICP) ce qui signifie » Messire Jean Chabod prêtre a fait faire cette œuvre en 1505 »permettant ainsi de dater ces peintures avec précision.

Ces peintures pas encore restaurées représenteraient pour les plus anciennes un calvaire tel que Jean Chabod en a vu un dans une église de Rome (début XVIe), les plus récentes devaient représenter un rosaire avec Saint Dominique (XVIIe).

On peut voir dans cette chapelle une piscine gothique sous le vitrail, une porte donnant accès à l’ancienne sacristie et au sol, l’entrée d’un caveau.

Tout de suite après la chapelle, on découvre sur le mur de la nef, une peinture de la même époque représentant Saint Benoit, fondateur de l’ordre des Bénédictins, posant la main sur l’épaule du donateur de la chapelle située de l’autre côte de la nef et qui porte, gravée dans la pierre, le nom du donateur B. Bachelart.

Vient ensuite la chapelle de la Vierge redécorée en 1901.

Sur le mur nord de la nef, se trouve deux chapelles gothiques dédiées à Saint Roch et Sainte Philomène ; cette dernière s’ouvre sur la nef par un arc  de style flamboyant, fleuri  et mouluré datable du XV è siècle  et comporte une piscine de même style. 

Entre les  2 chapelles on a restauré une partie de la litre funéraire (bande noire) qui faisait à l’origine le tour de la nef et sur laquelle on peignait le blason des seigneurs lors de leur décès ;en dessous on découvre un groupe de 2 pèlerins de St Jacques de Compostelle ,celui debout à droite est probablement Saint Roch car il relève sa robe pour laisser voir le bubon sur sa cuisse, l’autre  à gauche  agenouillé  avec son bourdon et son grand chapeau prie Saint Roch .Le tout datable du XVI è siècle est malheureusement très abimé.

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Une très belle grille en fer forgé  de style XVIIIe sépare la nef du chœur.

Si l’on avance vers l’abside en cul de four, on passe devant la sacristie construite en 1861 puis devant l’autel (ancien et très important pétrin) puis sous un vaste arc ogival sous lequel est accroché un grand Christ en Croix en bois peint du XVIIIe.

Nous sommes maintenant dans l’abside, partie la plus ancienne de l’église ; elle est éclairée par cinq fenêtres en plein cintre reposant sur dix colonnes cylindriques jumelées et un bahut à hauteur d’appui au boudin rond. Les chapiteaux sont finement ornés de figurations végétales de deux types : feuilles d’eau et feuilles d’acanthe.

Seules trois des cinq ouvertures sont d’origine romane.

Les vitraux installés en 1864 représentent la Sainte Famille : au centre le Christ bénissant avec une cape rouge, à gauche la Vierge Marie et à droite St Joseph.

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Le grand baptistère ancien  en calcaire blanc a été installé en 2004.

En 2009 le maitre verrier Geiss a crée  cinq nouveaux vitraux décorant les chapelles gothiques ainsi que les fenêtres au fond de la nef.

Un chemin de croix du XIX è siècle à quatorze stations fait le tour de la nef ; un certain nombre de statues polychromes du XXe siècle en plâtre peint décorent l’église, celle de  Ste Philomène en bois doré est la plus remarquable.

Les bancs en bois de chêne (XIXe siècle) sont numérotés et certains portent encore les noms des familles qui les occupaient : 1 Charveriat, 2 Berthelon, 15 Odet, 20 Savigny…

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